De la jalousie

  • Le 30/06/2018
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De la jalousie

 

 

 

 

 

    Rien n'est plus lénifiant, ni même consternant, comme de lire la presse! Les faits s'y succèdent apparemment sans raisons, comme si nous n'étions que des vaches, broutant chaque jour; pendant que la mort nous "gobe" les uns après les autres, dans un monde qui nous serait au fond étranger!

    Mais n'est-ce pas ainsi que vit le plus grand nombre, l'ensemble de la société?

    Certes, nous sommes "forts en gueule", nous nous voulons acteurs, et nous croyons réellement à notre importance, mais nous subissons plus les événements que nous les comprenons; nous sommes tout de surface et nous n'avons pas plus de poids que des ballons qui s'envolent!

    Finalement, la société n'est pas plus fortement attachée à la réalité qu'une toile d'araignée à un mur! Sa vie est celle du souffle qui soulève le voile arachnéen et elle semble ainsi "être à son affaire", mais elle ignore ce qui la motive au plus profond, comme l'insecte ne voit pas les nuages, qui annoncent le vent qui pourrait détruire son abri!

    Je prends un exemple... Je lis dans le journal: "Collision frontale entre deux véhicules, sur la route dite des..." Une photographie montre la violence du choc, car une des voitures n'a plus de moteur! Heureusement, il n'y a que des blessés légers, mais c'est quasiment un miracle!

    Imaginez maintenant à la une: " Aujourd'hui, montée d'angoisse et risque accru d'accident!" Dans l'article, on ferait appel à la prudence, de même qu'en cas de verglas! Car nous savons, ici, que notre moral n'est pas unique, qu'il est partagé par les autres plus ou moins chaque matin, et qu'il est sous l'influence de la quantité de lumière, de la température, de la pression, de la saison...; autant de facteurs que la science (dès qu'elle commencera à travailler) pourra déterminer avec précision!

    Si on voyait les choses ainsi, on arriverait à mieux se comprendre; on serait sur le chemin des grandes lois qui nous régissent; sûrement pas encore avec le flair d'un chien de chasse, mais on aurait au moins l'air un peu plus digne, comme un commandant qui regagne son bord et donc ses responsabilités, après une regrettable nuit de beuverie!

    Cependant, comme on approche du soleil, on approche de la vérité et déjà certains auraient l'encolure qui les démangerait... L'hypocrisie en effet est comme un âne qui refuse d'avancer... Quoi? Reconnaître qu'on peut, que tout le monde même peut être sujet à l'angoisse? Mais ne vaudrait-il pas mieux se pencher sur l'énigme du saint suaire, puisque nous avons l'air décidés, hein?

    L'orgueil empêche le progrès, la connaissance! Il est une façade de théâtre que l'on veut impeccable! C'est une affiche du bonheur portée par des morts! C'est la vitrine de Noël qui cache le taudis! "Messieurs, l'orgueil meurt, mais ne se rend pas!"

    L'orgueil n'avouera jamais son malheur, ses peurs, car il devrait reconnaître son impuissance, sa faiblesse, son ignorance! On peut lui chauffer les pieds, c'est un monstre de glace! Et il n'a qu'un seul destin, c'est d'être marié à la réussite!

    Pourtant, son origine est des plus simples... Il n' a pas, comme le suggère la Bible, la marque de Belzébuth sur le front! Il vient bêtement de notre instinct de domination, qui lui-même, bien qu'ignoré de Freud (comme on voit la lune et pas le soleil!), est le fruit de l'évolution!

    Vouloir dominer, être supérieur, nous érige évidemment en guerrier tout puissant, ou en reine implacable! Notre orgueil trouve là sa raison d'être, son auberge, où il sera traité comme un coq en pâte, à côté de l'égoïsme, de la vanité ou de l'amour-propre, car tout ce beau monde constitue la même chambrée et ronfle à l'occasion tout son soûl!

    Mais imaginez encore que tout le monde finisse par comprendre que la domination qui nous mène fait de nous des tyrans et que c'est cela le mal qui nous éloigne du bonheur! Ne pourrait-on pas alors rêver de la scène suivante?

    Le maire d'une grande ville arpente son bureau: " Je veux évidemment que ma ville se développe, soit la plus dynamique et même la plus belle! Mais quelle est la part de mes ambitions personnelles dans mes projets d'urbanisation, car détruire la nature plus qu'il est nécessaire, c'est aussi nous condamner?"

    Ce serait là un véritable travail de discernement, qui témoignerait d'une élévation générale de la conscience et qui éviterait sans nul doute des situations empoisonnées, comme celle de Notre-Dame-des-Landes! Un maire mâture provoquerait une discussion infiniment plus saine et n'aurait aucune peur d'exposer ses arguments! Il serait sûr de son fait et d'ailleurs il pourrait juger de son honnêteté, par son calme, à mesure que se dresserait l'opposition, car notre égoïsme est bien plus sensible que notre sentiment de la vérité! On se regarderait enfin!

    Imaginez toujours Macron disant à Trump: "Nous savons que vous êtes un tyran... Non! Ne montez pas sur vos grands chevaux! Ecoutez-moi jusqu'au bout! Ce que je veux dire, c'est que vous prêt à tout pour qu'on parle de vous, pour que vous soyez la vedette! Et c'est ce qui explique pourquoi que vous avez rejeté les accords de Kyoto, ceux établis avec les Iraniens et que vous avez installé votre ambassade à Jérusalem! Nous comprenons cela, mais pas au prix de faire des morts (50 terroristes selon l'ambassadrice israélienne de Bruxelles!), ni de menacer la paix mondiale!"

    Hein, ce serait mettre Trump au pied du mur..., ce serait le responsabiliser, le faire grandir; lui qui, avant d'être président, participait à des shows télévisés, où il adorait dire à de pauvres candidats: "Vous êtes viré!"

    Imaginez enfin que tous hors de chez nous, nous pensions: "Dominer ne servant à rien, qu'est-ce que je peux faire? Mais je peux me montrer curieux de mon prochain, et même prévenant avec lui, car plus je lui faciliterai la vie, et plus la mienne sera libre et agréable elle aussi!" Nous aurions alors de véritables êtres humains dans la rue! Et ce serait encore mille fois mieux que dans la chanson de John Lennon!

    Mais non, nous ne voulons pas de l'évidence! de la vie au grand air et du soleil! Nous ne voulons pas de la santé, de l'avenir, du changement et de l'espoir! Bien au contraire! Ce que nous voulons, c'est vivre comme des rats! d'affreuses araignées! sous le joug de notre instinct, de notre orgueil, de notre amour-propre! Ce que nous adorons, ce sont les sentiments bien sales, c'est notre petite cuisine poisseuse, nos machinations, nos calculs d'usuriers, nos victoires de demi-sel!

    Et l'un des poisons que nous goûtons particulièrement, c'est celui de la jalousie! Il nous saisit, nous fige, nous ferme, nous fait bouillir et de la marmite monte la haine, l'envie de détruire!

    Et c'est le mépris qui est notre arme de civilisés! Le dégoût, l'indifférence, le dénigrement sont destinés à rabaisser, à blesser, à nous conserver dans une position supérieure, car il est inutile de dire que plus nous cherchons à dominer et plus nous sommes susceptibles de jalousie!

    Mais les hommes heureux n'envient personne (sinon ils ne seraient pas satisfaits!)! Et ici les bras m'en tombent! Je connais des gens qui ont tout ce qu'on peut espérer, qui possèdent le paradis aux yeux des plus pauvres, qui gagnent bien leur vie, avec un travail intéressant; qui vivent en famille dans une belle maison et qui pourtant sont capables de jalousie, de la haine la plus sombre!

    Mais alors qu'est-ce qu'il leur manque? Pourquoi ne sont-ils pas épanouis? Qu'est-ce qui pourrait les rendre heureux?

    Pour le savoir, il faut se demander ce qui déclenche leur jalousie... et c'est toujours la même chose, c'est la liberté, la joie, le plaisir que semble ressentir en plus l'autre! Mais pourquoi ne pas s'en réjouir pour celui-ci? Eh! C'est que cette satisfaction qui émane de l'autre nous enlève a priori de notre pouvoir, comme si on comptait subitement moins, comme si notre route était moins importante ou moins bonne!

    L'air nous manque à présent et la haine nous remplit, aussi sûrement que si nous étions une bouteille sous un robinet!

   Mais pourquoi alors ne pas courir vers l'autre, vers celui qu'on envie, pour lui demander comment il fait, quel est son secret, sa méthode, celle qui le fait si radieux, si à l'aise, si libre?

    Eh! Mais c'est que l'orgueil nous retient, nous ceinture, nous dit que nous sommes fous, ainsi qu'on voudrait se jeter à l'eau! L'orgueil est l'ami sournois, apparemment dévoué, mais qui dans le fond ne nous aime pas, en voulant notre perte!

    Reste qu'on pourrait tout de même faire taire la haine en nous, car c'est un sentiment laid, destructeur, indigne de nous-mêmes, et on pourrait se consoler en se remémorant les qualités qu'on possède, l'évolution que nous savons être la nôtre! Du moins, ainsi serait-on sur le chemin de la sagesse, puisqu'on contrôlerait l'instinct!

    Mais non! La plupart ne voit aucun inconvénient à leur jalousie, leur mépris, comme s'ils étaient un droit! Leur dominance leur paraît si légitime, leur orgueil si important qu'ils ne pensent même pas une seconde à se remettre en question! Ils blessent, ils détruisent en toute impunité! Ils créent un enfer pour eux, comme pour les autres, et ils sont tout étonnés de leur malheur, car les années passent, sans leur apporter de solutions, mais au contraire la maladie et le désenchantement s'installent! Et on finit par rejoindre le domaine des vers, ou on part en fumée, non sans avoir maudit la vie et les autres tous les jours, et on pourrait conclure ainsi: une taupe rejoint sa famille, ou du vide l'atmosphère!

    Mais même d'exposer que la jalousie révèle un manque de joie, un échec, est impossible! Car immédiatement tout le monde est parfaitement heureux, équilibré, sans haine et on vous demande si vous n'avez pas rêvé, si vous n'êtes pas vous-même paranoïaque, pour soupçonner chez les autres un sentiment aussi vil, aussi dégradant que la jalousie! Et vous voilà comme David Vincent, dans une petite ville du désert! On vous regarde avec commisération, alors que vous savez chacun dans l'impossibilité de bouger son petit doigt, signe que tous sont des extraterrestres, venus pour détruire la Terre!

    Face à l'orgueil, il ne vous reste plus qu'à reprendre la route, avec le secret espoir que vous arriverez, un jour ou l'autre, à en convaincre d'autres; qui se mettront en marche, vers un monde meilleur!

    On comprend aussi pourquoi les hommes ont toujours cru qu'il y avait comme une sorte de damnation en nous..., car nous pouvons tous être le témoin de l'impasse dans laquelle nous conduit l'orgueil!

    Pourquoi cet acharnement, cette fermeture, ce gouffre? Comment expliquer une telle persévérance dans la nuit, l'ignorance et le mal? La seule solution qui me vient à l'esprit est que le tyran n'est pas développé, qu'il est encore un bébé dans ses langes!

    Rappelez-vous, le bébé crie et ses parents accourent normalement pour le satisfaire... et n'est-ce pas ainsi que fonctionne la jalousie? En blessant de son mépris ou en affichant son dégoût, ne fait-on pas tourner le monde autour de soi, comme si les autres n'avaient pas d'existence propre, ni droit au respect? N'est-on pas ainsi le centre de l'Univers, la seule personne qui compte? Ne reprend-on pas le pouvoir?

    Je crois que si... et le tyran vit encore dans l'illusion qu'on peut triompher sur les autres et que c'est cela le bonheur! Si seulement, il pouvait regarder autour de lui! voir qu'il ne mange en fin de compte que des cailloux, que sa peine est sans fin, sa soif inaltérable et que le chemin de la domination n'est qu'un immense désert!

     Et le sage doit affronter cet obscurantisme désespérant! Mais apparemment nous ne vivons qu'en lutte...

    "A la gare, il y avait trois cache-poussière... et dans les cache-poussière, il y avait trois balles!

    _ Non! l'Harmonica! Non! C'était pas mes hommes! Mais surtout pas de fausses notes, hein, l'Harmonica!

    _ Zzzzouitt! Comme celle-ci?"

   

 
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