RAM N!

  • Le 22/05/2021
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Ram n 2

 

 

 

 

                                                         "Ils arrivent!"

                                                              Le Jour le plus long

 

 

    Journal de Jack Cariou, monde de RAM, lundi 17 mai: comme d'habitude, RAM commença la semaine maussade, inquiet et agressif! Il ne pouvait en être autrement, car le dimanche ne le reposait pas, mais au contraire lui faisait peur, le minait!

    Pourquoi? Mais RAM vivait pour dominer et l'inaction, le calme ne lui permettaient pas de se sentir supérieur! Il avait tout essayé! la beuverie du samedi soir, qui le laissait le lendemain assommé et avachi devant la télévision! les promenades dominicales interminables, qui l'épuisaient, le vidaient! les déjeuners familiaux, copieux et bien arrosés, qui se terminaient en débinant les absents, comme si on avait nourri l'amertume!

    RAM avait même continué de travailler, ignorant le jour de repos, mais ses bruits de chantiers étaient contre sa propre loi et il avait dû s'arrêter! Il aurait pu encore jouir du silence, du spectacle des nuages, s'enchanter des oiseaux et du vent dans les arbres, mais la nature l'ennuyait, l'effrayait même! Il voulait se voir partout, que toute chose reflète son importance, sinon il angoissait!

    Bref, RAM ne savait pas vivre, être en paix avec lui-même et ce matin-là, il enfila son armure avec un air sombre, avant de sortir dans la rue! Là, il voulut écraser deux ou trois types qu'il croisa, histoire de montrer qui était le maître et de donner à sa domination son petit-déjeuner! Puis, il alluma une machine infernale, dont le bruit sema le chaos, car ainsi RAM s'abrutissait, ne pensait plus et faisait régner une sorte de terreur! La ville pouvait alors s'éveiller!

    Sa femme Stress ne fut pas de meilleure humeur! Elle sortit de chez elle comme si le monde lui appartenait! Elle était élégante, avec un parapluie transparent! Cependant, elle dut attendre un instant, avant d'entrer dans un magasin, et elle repéra une proie, un homme! Elle le fixa, pour lui dire qu'il était à elle!

    Stress avait besoin de sexe, pour se soulager, mais, s'il devait bien y avoir un échange, elle resterait dominante! Pas question qu'elle ne commande pas! On pouvait la satisfaire, si on restait inférieur, à peine existant! L'autre n'échappait pas au brouillard qui l'entourait et qui rendait esclave! Sans doute, tout de même, récompenserait-elle son "étalon", en lui offrant un verre d'eau ou un mot gentil! Elle n'était pas toute en bois!

    Ainsi, parfois elle pleurait! Elle avait passé tout son dimanche à s'inquiéter, à se ronger les sangs! RAM n'était pas un bon mari, se désintéressait d'elle et elle avait peur, sans trop savoir pourquoi! C'était encore elle qui avait à charge de faire vivre le couple! Elle pensait pour deux! Si on n'écoutait que RAM, rien ne se passerait, nulle réunion de famille, nulle promenade, nulle fête, nul espoir! On serait enseveli, enterré avant l'heure, sous l'ennui!

    Et puis le lundi, elle reprenait le travail! C'en était trop et les larmes lui montaient aux yeux! Elle raconta alors à un quasi inconnu, mais qui semblait s'intéresser à elle, sa jeunesse, très sportive, qui lui causait aujourd'hui des douleurs, des rhumatismes! Elle eut de la tendresse pour elle-même et se sentit légèrement ragaillardie! Un peu de sève la réchauffait!

    Comme d'habitude, ce jour-là, le monde de RAM faisait la grimace et il ne lui manquait pourtant rien, seulement l'essentiel! Au loin, retentirent les premières ambulances!

    Journal de Jack Cariou, monde de RAM, mardi 18 mai: monsieur Nuit n'en revenait pas! On lui avait résisté! Il eût voulu détruire ce... type! ce minable! Il sentit de nouveau une haine atroce l'envahir!

    Mais pourquoi s'embrasait-il ainsi? N'était-ce pas indigne de lui? N'était-il pas le plus fort, le centre de tout? Existait-il vraiment autre chose que lui? Mais il avait eu peur! Oui, une peur horrible, nouvelle pour lui! d'où sa haine, son envie de pulvériser!

    Il essayait de comprendre... Il vivait à condition de contrôler le monde, que celui-ci se soumette, soit sa chose! Il était comme un aimant, avec de la limaille de fer autour! C'était la condition sine qua non de son équilibre! Bien sûr, il n'avait pas la main mise sur tout, loin s'en fallait! Mais là où il était, c'était chez lui!

    Or, cet individu n'avait pas été influencé! Il était resté hors de sa puissance mentale, comme un rocher au milieu des flots! Monsieur Nuit avait eut l'impression que des barbelés avaient déchiré sa bulle, que l'oxygène s'en était brusquement échappé et qu'il avait failli étouffer! Ce type-là, il devait le retrouver, pour savoir qui il était, quel était son parcours, d'où venait son étrange force! Il fallait analyser la menace, pour mieux l'effacer!

    Monsieur Nuit s'approcha de la fenêtre et regarda la ville... Elle ne lui était pas hostile, bien au contraire! Comme lui, elle fonctionnait suivant sa domination! Ses habitants se réjouissaient de se supplanter les uns les autres et ils voulaient la nature comme un miroir de leur puissance!

    Ici, pouvaient naître et prospérer les enfants de monsieur Nuit! Ils seraient les enfants de RAM, ses futurs adultes! Car monsieur Nuit avait un don funeste: il pouvait semer sa nuit et la faire germer!

    Il sortit et sillonna la ville et dans tous les endroits qui étaient plutôt sombres et peu fréquentés, il s'arrêtait pour laisser tomber quelques gouttes de son sang, qui n'était que de la nuit! Et bientôt, les gouttes s'agrandirent, devinrent des poches, dans lesquelles des fœtus se développaient, mûrissaient, avant de se libérer de leur enveloppe!

    Des garçons et des filles, en grand nombre, commencèrent à mener leur existence dans RAM! Ils n'avaient pas trop de peine à obtenir ce qu'ils voulaient, tant ils dégageaient un pouvoir obscur! C'était quelque chose d'impalpable, qui avait la force d'une maladie, d'un déséquilibre, d'une pente!

    Même les adultes, sans se l'avouer, en avaient peur! Ils étaient bien supérieurs physiquement, mais, sous les yeux de ces jeunes, ils éprouvaient une gêne, un malaise, et ils cédaient ne serait-ce que pour en être débarrassés! RAM changeait! Chaque jour, il y avait des faits d'une criminalité toujours plus étrange, plus grave, plus inquiétante, ainsi qu'un lierre aurait asphyxié RAM, déjà victime du virus!

    Journal de Jack Cariou, monde de RAM, mercredi 19 mai: RAM avait une fille: Parole! Il l'aimait particulièrement, la choyait! C'était son rayon de soleil, sa joie et il aimait danser avec elle! Il est vrai qu'elle séduisait, envoûtait même, avec ses boucles qui étincelaient comme ses yeux! RAM ne pouvait plus s'en passer et il demandait où elle était, dès qu'il ne l'entendait plus, ne la voyait plus!

    Il était inquiet sans elle et il lui arrivait de ne plus pouvoir la quitter! Ils dansaient alors tous les deux jusqu'à l'étourdissement: elle de plus en plus riante, légère; lui de plus en plus lent et comme perdu! Stress, la femme de RAM, ne voyait pas ces jeux d'un mauvais œil et c'est même elle qui les provoquait, ce qui fait qu'elle n'était pas jalouse!

    Mais parfois RAM était sujet à un abattement profond, sans savoir pourquoi! Il était là hagard, comme un fantôme, avec des gestes mécaniques et il se montrait volontiers hargneux, coléreux, blessant et tyrannique! Il estimait qu'il en avait le droit, que le petit méritait d'être écrasé! Car lui RAM était malheureux et cela seul comptait!

    Sa fille derrière était d'accord! Parole elle-même se montrait agressive, acerbe, mauvaise, comme si jusque-là son temps n'avait pas été occupé par des fêtes, des plaisirs! Elle se sentait étrangement lésée et sa langue de vipère le faisait savoir! La famille était odieuse, crainte, tant qu'elle ne retrouvait pas une période favorable, qui lui redonnait aussitôt le sourire et Parole et RAM recommençaient à danser!

    Cariou ailleurs... Je marche dans RAM en retrouvant la domination dans tous ses états, car c'est une journée à angoisse! Quand ils ont peur, l'homme cherche à être le chef et la femme irrésistible! Par là, je vois que chacun est dans la nuit et ne comprend même pas ce qui le motive!

    A chaque coin de rue, pourtant, il y a une scène prévisible! Ici, on parle haut pour se rassurer! Là, on me dépasse avec dédain, comme si je n'étais que poussière! Là-bas, on m'offre le galbe d'une cuisse, ou on se tient bien droit, pour montrer la fermeté de ses fesses!

    On est en représentation, mais nullement en paix! On n'est pas heureux! On essaie seulement de masquer son effroi! Je m'enchante tout de même du monde, quand quelqu'un me heurte! "Espèce de butor! me crie l'individu. Vous ne pouvez pas faire attention!" Je vais pour répondre, mais je reconnais qui est devant moi: "Excusez-moi, m'sieur! je fais avec une voix de demeuré. J' cherche le Colysée!"

    L'homme me regarde quelques secondes... "Cariou?" "Sacripante!" Nous nous tombons dans les bras et très vite nous trouvons un banc, pour nous raconter les nouvelles! On se rappelle que Sacripante est un Italien, qui travaille comme technicien à l'OED (Organisation Ennemi des Doms)!

    "Sacripante, vous allez peut-être pouvoir m'expliquer ce que je fais ici, car j'étais à la station Charcot, dans mes derniers souvenirs!

    _ Oui, je crois avoir entendu parler d' ça... C'est pas net, mais l'armée aurait joué un rôle! C'est de là-bas qu'est parti le virus et d'après ce que l'on sait, il y a eu une hécatombe chez vous, non?

    _ Oui, c'était pas joli!

    _ Ecoutez, je vais peut-être vous raconter des bêtises, mais je crois qu'on a réglé la situation d'une manière secrète! En tout cas, on n'entend plus parler de cet endroit!

    _ Mais RAM, qu'est-ce que c'est?

    _ RAM! RAM a toujours été là! Il avait un autre nom... et puis, vous avez sans doute évolué! Comme moi d'ailleurs, car l'OED n'existe plus!

    _ Comment?

    _ Oui, certains ont voulu commander, dominer et ils sont devenus eux-mêmes des Doms! Pour moi, nous avions perdu la partie et quand j'ai quitté l'organisation, elle était en pleine crise!"

    Je digère ces propos et je reprends: "Venez avec moi, Sacripante! Je vais vous montrer quelque chose et vous allez peut-être pouvoir m'aider!" Nous arrivons bientôt dans une artère... "Vous voyez le jeune homme sur la gauche, Sacripante, celui qui est adossé contre le mur et qui paraît l'innocence même, le nez sur son petit écran? Eh bien, c'est un DTN (Dom Trou Noir)! Il engloutit toutes les énergies autour de lui!

    _ Vous avez toujours été meilleur que moi, pour les reconnaître...

    _ Maintenant, regardez sur la droite, un peu plus haut, cette jeune fille... C'est aussi une DTN et il y en a comme ça tous les cinquante mètres! Ce que je voudrais, c'est ramener un peu la réalité ici, en trouvant un moyen de troubler ces jeunes gens!"

    Nous filons chez Sacripante et il se met au travail, car c'est lui le génie de la technologie, et moi, j'en profite pour passer une bonne nuit! Au matin, cependant, Sacripante me présente un objet: "C'est un brouilleur! m'explique-t-il. Il agit sur la liaison qui existe entre la puce du cerveau et l'écran consulté, comme si d'un seul coup le sujet voyait à travers des lunettes 3D! Il ne reste plus qu'à choisir un univers!

    _ Parfait! Je voudrais qu'on soit catapulté dans le ciel, dans les nuages!

    Nous retrouvons la rue et essayons le brouilleur, mais la réaction est inquiétante! Elle ne témoigne pas d'une découverte, d'un émerveillement, mais elle est puissamment hostile, haineuse! Le jeune se met à donner des coups et à crier! "Diable! Nous ne sommes pas sortis de l'auberge! je fais.

    _ Les gens ne veulent pas être heureux, mais dominer, Cariou!"

 
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