Les enfants Doms (T2, 191-195)

  • Le 17/06/2023
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Doms65

 

 

     "De la part de Sharky!"

                        Permis de tuer

 

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     Piccolo attend avec son numéro, dans l’agence pour l’emploi et il fredonne, car une nouvelle vie commence : il va avoir un travail, un salaire et il achètera plein de choses, trouvera un logement, invitera des amis, des collègues et il sera gonflé d’énergie, avec un tas de projets ! Il ne se sentira plus exclu ! Il retrouvera une certaine innocence et tous ses troubles, toute son errance passés lui sembleront appartenir à un cauchemar !

Au camp de redressement matérialiste, on lui a dit qu’il était guéri, que sa volonté de travailler, de se joindre aux camarades, en se rendant utile à la société, était maintenant évidente et il a été autorisé à se présenter à l’agence pour l’emploi, ce qui lui a encore permis de retrouver l’air libre de RAM, son agitation stimulante et ses rêves derrière les vitrines !

Mais ça y est : le numéro de Piccolo s’affiche ! Il doit se présenter devant une machine qui le scanne, qui contient toutes les informations nécessaires, qui a l’aspect d’une armoire massive, sans ornements, au point qu’elle paraît ne pas aimer ce qu’elle fait, ce qui inquiète un peu Piccolo, mais baste, à la clé il y a une offre d’emploi et un avenir radieux !

Après ce passage et pour connaître le résultat, Piccolo est appelé dans un bureau, où impatient il ne fait même pas attention à tout ce gris qui l’entoure et à la figure rébarbative de l’homme en face de lui ! Celui-ci regarde distraitement un écran, puis, avec semble-t-il une pointe de satisfaction, il dit : « Désolé, mais la machine ne vous propose rien ! Elle explique même qu’elle n’aura jamais pour vous une offre d’emploi, car elle vous déclare impropre à tout travail ! Curieux !

_ Hein ? Mais qu’est-ce que ça veut dire ! Je veux travailler, c’est pas une blague ! »

L’homme se redresse sur son siège : « Je regrette, la machine est catégorique ! reprend-il. Elle ne vous veut pas, c’est tout ! Et si la machine ne vous veut pas, nous non plus ! Enfin, le système, j’ veux dire !

_ J’ comprends pas ! J’ suis prêt à faire n’importe quoi !

_ Peut-être, mais c’est la machine qui décide !

_ Écoutez, tout ce que je veux, c’est un salaire, mon indépendance, être content de ma journée, repartir du bon pied !

_ Mais… je comprends… (il se met à taper sur son clavier). Je demande plus d’infos… Ah zut ! Pourquoi ça marche pas ? Bon, on va essayer comme ça ! Eh ben voilà ! Alors, Piccolo… Scan 18/6, seize heures… Mmmm…. Non, pas moyen… Y a une priorité rouge sur votre nom… J’arrive pas à ouvrir !

_ Mais enfin on peut pas empêcher quelqu’un de travailler ! On ne peut pas lui interdire de bosser, sinon comment il va vivre ?

_ J’ chais bien… Ce que vous pouvez faire, c’est demander à voir une assistante sociale !

_ J’ chuis fatigué d’un seul coup ! Vous pouvez m’ dire pourquoi les choses les plus simples deviennent les plus compliquées ? J’ comprendrais que la machine me refuse, si je faisais preuve de mauvaise volonté, mais ce n’est pas le cas !

_ Écoutez, j’ peux pas faire plus ! Je vous ai donné la piste de l’assistante sociale…

_ Mais ça arrive souvent que la machine ne propose rien, comme si on avait la peste ?

_ Non, vous êtes l’un des rares ! A vrai dire, c’est la première fois que je vois ça ! C’est pour ça que je vous dis que je suis impuissant, car c’est pas une erreur ! Votre dossier est bloqué !

_ J’ comprends pas…

_ Excusez-moi, mais je dois prendre d’autres personnes ! »

Piccolo sent la colère monter en lui, d’autant que celle-ci s’échappe de blessures anciennes et qu’elle a déjà été maintes fois retenue ! Mais, encore une fois, Piccolo se contient, car il ne servirait à rien de s’emporter contre l’homme du bureau et il se lève et quitte la pièce !

Il est abattu et passe devant la machine et maintenant qu’il la regarde avec un autre œil, elle lui semble suffisante, arrogante et formidablement bête ! Il se demande qui elle est vraiment et profitant que personne ne se trouve devant elle, il lui fait face et la manipule dans tous les sens, ce qui fait qu’elle s’échauffe, se met à clignoter et qu’une alarme se déclenche !

Deux gardiens font irruption et tire Piccolo en arrière, avant de le coucher sur le sol ! La confusion est totale, le bruit assourdissant et finalement la machine s’ouvre, libérant son contenu ! A la grande stupéfaction des personnes présentes et provoquant leur horreur, un flot d’os et de chair pourrie se déverse sur le sol, telle une inondation ! On entend des cris et on se précipite vers la sortie ! Mais Piccolo et ses gardiens, eux, ont à leurs pieds des crânes, aux dents serrées, comme s’ils souffraient !

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     « Zut ! se dit Cariou. Y a plus d’ pain ! Va falloir que j’aille en chercher ! » Cariou s’habille, il met son gilet pare-balles, son treillis et prend son arme, en espérant ne pas devoir s’en servir ! Puis, il sort et avance d’un pas rapide ! D’abord, l’espace est dégagé et a priori sûr, mais à cette heure des bombardiers filent vers le nord, en un flot ininterrompu, et leur vacarme assourdissant assomme déjà Cariou ! Il s’efforce de rester concentré, quand il est soudain la proie d’un premier tir lointain ! La balle l’atteint, mais à cette distance et grâce au gilet de protection, elle ne cause pas beaucoup de dégât !

« Mais nous voilà dans le bain ! se dit Cariou. Et c’est pire devant ! » En effet, les rues deviennent plus étroites et les tireurs plus nombreux et plus proches ! Il y a des pièges aussi ! On peut tomber dans une fosse et finir esclave sexuel d’un chef libidineux ! Vigilance donc ! L’humanité s’ennuie et cultive ses vices, comme dit l’adage ! C’est le prix du confort et de la richesse !

Cariou essuie maintenant quelques tirs, mais ils viennent de gens qui n’ont pas de temps à perdre et qui se rendent au travail ! Leur mépris est fugitif, comme s’ils voulaient se rassurer, avant d’attaquer la journée ! Les braves citoyens ! Ils vont gagner leur vie et donc faire fonctionner la société, en écrasant tout de même un ou deux de leurs semblables ! C’est ainsi qu’ils rafraîchissent le sentiment de leur supériorité !

Cariou a tellement d’expérience qu’il évite leurs balles, presque sans y penser ! C’est la routine ! Celle d’une population aveugle et zéro effort (alors qu’elle court à son emploi!) ! Mais elle se croit dans l’Univers comme en classe  et vive les vacances ! Quelquefois, il y en a un ou une qui sont particulièrement énervés et ils font feu alors avec une arme plus lourde, tel un fusil à canon scié ! Ils tiennent de cette manière à affirmer leurs droits ! Ils sont en colère, car un serin a crotté leurs chaussures et c’est inadmissible, puisque cela vient se rajouter aux enfants qui souffrent de la faim !

Cependant, ces attaques sont trop grossières et isolées, pour vraiment inquiéter Cariou, qui se rapproche de la boulangerie ! Mais il est brusquement la cible d’un char et il se tend à l’écoute des chenilles ! Elles vont plus vite que lui, ce qui n’étonne pas Cariou, car difficile d’imaginer un conducteur de char en paix avec lui-même ! Et c’est aussi cette impatience qui sauve Cariou ! Le char bientôt le dépasse, le laissant tranquille, mais l’épreuve a été dure ! Les chenilles étaient juste derrière et ont menacé longtemps !

Cariou entre dans la boulangerie et il y a un client devant lui ! Celui-ci demande son pain avec une extrême circonspection, comme si c’était la première fois ! Cariou a assez de force pour ne pas broncher, mais il sait encore que c’est lui qui va payer ce temps perdu ! On va l’en rendre responsable et en effet, une femme arrive dans son dos et essaie de lui trancher la gorge ! Cariou ne doit son salut qu’à une gaine spéciale, en acier fin, qu’il a lui-même confectionnée et qui lui protège la nuque ! La femme est déçue et doit ronger son frein ! Certains derrière maintenant tirent à la mitraillette au-dessus de Cariou, qui n’en reçoit qu’un peu de plâtre !

Pas d’ quoi fouetter un chat et Cariou, son pain dans la main, s’échappe ! Un tir de bazooka peut-être, avant qu’il ne disparaisse totalement ? Cela arrive, mais, dans un espace aussi étroit, la démesure perd toute efficacité ! D’une manière générale, plus la haine se dévoile et plus elle en devient ridicule ! Un orgueil démonstratif montre sa souffrance et réjouit malgré tout sa cible !

C’est le retour ! Un vent frais souffle sur Cariou, mais il est encore loin d’être au bout de ses peines ! Il bute sur des déchets ! Des goélands crèvent des sacs poubelles laissés à l’air libre ! Le b.a.ba qui n’est pas encore appris ! Espérons que ce ne soit pas le fait de militants écologistes ! Ici, une affiche qui montre une guerrière antifa ! La violence en guerre contre la violence, ou comment le fascisme se tire une balle dans le pied !

Mais la folie est partout et Cariou n’en peut déjà plus ! Son pied tremble, son corps vacille ! Depuis combien de temps est-il parti de chez lui ? Deux ou trois siècles ? Qui est-il, quel est son nom ? A-t-il un but dans la vie ? Son cerveau n’est plus qu’une marmelade et il va falloir qu’il se repose, avant de se retrouver lui-même !

Et le sédentarisme, et l’obésité ? Comment soulager ces maux, dans un environnement aussi égoïste, aussi agressif, aussi destructeur ! Et la nature ? Comment ne nous serait-elle pas étrangère ? Comment la paix du ciel bleu ou le chant des oiseaux nous aideraient-ils ?

Cariou introduit sa clé et une balle vient frapper juste tout près de sa tête ! Jusqu’au bout !

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     L’ego est maussade ! Non qu’il ait faim, au contraire ! Il mange trop ! Il en est dégoûté ! La nourriture, c’est comme les problèmes : il y en a pléthore, jusque-là ! L’ego est maussade, il fait la grimace ! Que lui manque-t-il ? Que lui doit-on ? Il fait le tour des choses, le compte ! L’ego est maussade, il regarde le monde avec dégoût ! Sa tête grise de requin fait le tour, inspecte, rumine !Quelle sera sa victime ? Qui va payer la facture ?

Car rien ne va comme le veut l’ego ! Ça non ! Il est spolié, c’est évident ! Lésé ! On lui doit quelque chose ! Mais quoi ? L’ego est maussade, fermé, qui va payer ? L’ego est en colère ! Il rugit ! Il tape ! écrase ! Vocifère ! Il présente la facture, la note, l’addition ! Le montant : c’est la consommation en chauffage de l’enfer depuis qu’il existe ! De quoi trembler !

L’ego est maussade ! Il tourne sa tête grise de requin ! Il passe des enfants à la moulinette, pendant qu’il discute ! Il est plein de sang et sourd aux cris ! Il a d’autres chats à fouetter ! Il veut envahir l’Asie ! Il a aussi son champ de pyramides et il faut quand même l’entretenir ! C’est du boulot !

Évidemment, l’ego ne peut pas acheter le soleil ! Il n’est pas bête à ce point ! Il sait qu’il y a des limites ! Il a été bien éduqué, il peut être raisonnable ! Mais ses dix mille pétroliers, faut bien qu’ils circulent ! La vie n’est pas rose ! Elle est même injuste, cruelle !

L’ego est maussade ! Il tourne sa tête grise de requin ! Qui va payer ? Qui est responsable du malheur de l’ego ? Des esclaves sont là, tremblants… Ils offrent à l’ego ce qu’ils ont de mieux…Mais l’ego leur crache dessus ! Quoi, ils ne sont pas assez heureux d’être esclaves ! Il faudrait encore leur donner de l’attention !

L’ego dresse sa tête dans l’espace, elle se détend jusqu’aux bornes de l’univers ! Les supernovae n’ont qu’à bien se tenir ! Dieu lui-même doit prendre le sceau et la serpillière ! Et qu’ ça frotte et qu’ ça brille ! L’ego est maussade ! Il tourne sa tête grise de requin : qui va payer ?

L’ego est plein de morale, plein de sagesse ! Il dit qu’il faut être humble, ne pas se croire le centre du monde ! qu’il faut bosser ! qu’on ne fait pas ce qu’on veut ! que la vie n’est pas une partie de plaisir ! On opine, il faut filer doux ! Car qui peut affronter l’ego ? l’ego impayable ! l’ego extraordinaire ! l’ego fou !

Qui peut lui dire la vérité ? lui tendre un miroir ? Autant caresser un serpent à sonnettes ! Autant marcher sur la mer en pleine tempête ! Autant rire sur une mine ! L’ego explose au moindre mot ! à la moindre aspérité ! à la moindre plume ! Il explose et pulvérise ! Pourquoi ? Pourquoi l’ego est-il à vif ? C’est maladif ? Notre époque est une poudrière ! Pourquoi l’ego ne supporte rien ? Il en a plein la gueule pourtant ! Le moindre reproche, la plus petite observation et il explose ! On lui coupe un bras ! Il n’a aucune force apparemment !

La force permet le dialogue, pas l’ego ! La paix, c’est la force ! L’ego ne connaît donc pas la paix ! Pourquoi ? Peut-on satisfaire l’ego ? L’angoisse vide l’ego ! L’ego ne guérit pas son angoisse ! L’ego est un monde clos ! L’univers doit nourrir l’ego, tout doit aller dans le sens de l’ego ! C’est incessant et épuisant ! L’animal apaise sa domination, pas l’homme ! Car il a soif d’éternité ! Voilà pourquoi l’ego est maussade et tourne sa tête grise de requin !

Qui va payer la facture ? A qui le tour ? Le gouvernement, l’exploiteur, le facteur, l’étranger, les bigorneaux ? Le fils du voisin ? Le curé ? Le chômeur ? L’ego rumine : faut des coupables ! L’ego fait la une et dit qu’on le néglige ! L’ego marche sur des cadavres et dit qu’il n’y a personne ! L’ego est gavé et dit qu’il ne reçoit rien ! L’ego agresse comme un voyou et dit qu’il est en haillons sous la neige ! L’ego crie au danger et ronfle tout son soûl ! L’ego alerte sur la dictature et insulte les passants !

Non, l’ego est maussade ! Ça ne va pas ! Il tourne sa tête grise de requin… Qui va payer la facture ? Qui va être écrasé, broyé, déchiqueté ? L’ego renifle… Attention ! Qui va prendre ? Qui va morfler ? L’ego se dresse tel le tsunami… Qui sera emporté, noyé ? L’ego finalement rit (un rire sinistre, on dirait un gond rouillé!) Et tout le monde rit ! Finalement, y a pas que du sang dans la vie !

Mais l’ego vient d’attraper quelqu’un, un pauvre gars innocent ! Et il le dévore, alors que la bonne humeur n’est pas encore retomber ! Sacré ego ! Impayable ego ! Magnifique ego ! L’ego, c’est l’avenir, sûr !

                                                                                                  194

     L’ego est un farceur ! Il est contre le fascisme ! Il se dit antifa ! Il est contre la soumission ! Les gros trusts ! Les riches ! Et il se dit insoumis ! Il lutte pour la liberté ! C’est beau, c’est grand !Tiens, on a la larme à l’œil ! Mais pourquoi ? Pourquoi l’ego lutte pour la liberté ? Mais pour dire : « Regardez-moi ! C’est moi l’ego ! Admirez-moi ! Je suis le centre ! Le post-ado ! C’est moi le centre ! »

Hein, l’ego quel farceur ! La justice sociale ? Mais c’est moi le maître ! Regardez le pauvre !Vous ne le considérez pas ! Autrement dit, vous m’ignorez ! Respectez le pauvre, donc respectez-moi ! Le pauvre en haut ! Donc moi en haut ! A bas le fascisme ! Car il est en haut, il commande !Alors que moi je suis en bas !

L’ego pousse et veut la place ! C’est sa misère ! C’est sa chaîne ! C’est sa soumission, son esclavage ! C’est sans espoir, sans issue ! Car que peut espérer au fond l’ego ! Être le maître ? Être la star, comme dans ses rêves d’ado ? Il veut quoi ? Il veut de la soumission, de l’esclavage, de l’admiration, comme dans ses rêves d’ado, où il était plein de lui-même ! Où il était le centre ! Où on l’adulait ! Où il était en sécurité ! Où il n’y avait rien d’autre que lui !

C’est ce que veut l’ego, rester un ado ! Mais ce n’est pas possible ! C’est sans issue ! Nul n’est le maître, quand tout le monde veut l’être ! Alors l’ego déteste ce monde, qui n’est pas comme dans ses rêves d’ado ! On échappe à l’ego ? Il méprise, hait, détruit ! L’ego est l’ado haineux, boudeur !La lumière échappe à l’ego et il aboie et veut la mordre !

La lumière échappe à l’ego, car elle n’a pas besoin de lui ! Elle n’a plus d’ego ! Elle seule est libre, pas l’ego ! Cours, cours l’ego ! Aboie, aboie ! Mords ! Mords ! C’est sans espoir ! L’ego est une prison, où il n’y a pas d’eau ! Où on meurt de soif ! L’ego chaque jour montre les dents ! Pauvre ego ! La lumière s’en joue !

La lumière est comme l’eau : elle chante et danse ! La lumière est libre, pas l’ego ! L’ego dit : « Alerte ! Alerte ! Y a urgence ! Problèmes ! » La lumière hausse les épaules ! Elle connaît les problèmes de l’ego, ce farceur ! C’est sans fin ! La peine de l’ego, c’est l’ego ! La peine de l’actualité, c’est l’ego ! L’ego est triste ! C’est un assassin ! Chaque jour il piétine, méprise, écrase !Il essaie de tuer la lumière, mais elle s’échappe comme un papillon ! Elle connaît les mensonges de l’ego ! Ce farceur !

L’ego dit : « Regarde mes pauvres ! Vois comme ils sont victimes de l’injustice ! Tu sais combien gagne machine ? » L’ego fait trembler au nom de ses pauvres, Mais il s’en sert, car l’ego des pauvres est plus petit ! Sans danger pour le sien ! L’ego se moque des pauvres ! La belle affaire ! A bas le riche, puisqu’il ne pense pas à moi ! Puisque c’est lui qui dirige le monde, selon ses rêves d’ado !

L’ego ne supporte pas qu’on lui échappe ! Qu’on ne lui soit pas soumis ! Ainsi l’ego n’aime pas l’ego ! Et surtout pas la lumière ! La lumière est belle ! Elle ne se nourrit pas de l’ego ! Elle rit de l’ego ! Elle est paisible ! Quel est son secret ? C’est l’amour ! L’amour sans ego ! Est-ce possible ?La lumière qui scintille sur le ruisseau qui chante… Est-ce possible ? Le géant de coton dans le ciel bleu… Est-ce possible ? La caresse de la mer, après sa furie… Est-ce possible ? Un sourire, à côté de la haine… Est-ce possible ?

Oui, l’amour sans ego est possible ! C’est plus tes rêves d’ado ! C’est plus toi le maître ! C’est toi libre, sans ego ! C’est la lumière et le mystère ! Allez, viens, faisons jouer le triste ego ! Faisons lui faire le beau ! Il est tellement bête ! Tellement haineux ! Tellement laid ! La lumière rit de l’ego ! Elle rit de la haine de l’ego ! L’ego fulmine, enrage, car il voit que la lumière lui échappe !ne lui est pas soumise !

La haine de l’ego nourrit la lumière ! Elle lui donne raison ! Pauvre ego ! Triste ego ! Laid ego et assassin ego ! Quel farceur ! Il dit encore : « Regarde mes pauvres ! Quelle injustice ! Le riche a ma place ! Le riche à ma place ! Voilà ma misère ! » La lumière répond : « Regarde la beauté du monde ! Regarde la force ! Regarde l’amour ! Regarde ! Mais regarde ! Lève le nez de ton nombril ! »

Alors l’ego hait ! On lui demande trop ! C’est pas comme dans ses rêves d’ado ! C’est pas lui le maître ! C’est la lumière ! Mais quelle tête il a ! Les enfants rient de lui !

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     L’ego dit à la lumière : « Tu n’es pas sérieuse !Tu es inconséquente !Tu verras, la vie c’est bien autre chose ! Faut travailler, gagner sa croûte ! C’est pas comme tu veux ! En fait, tu t’ fous d’ ma gueule ! Je me saigne aux quatre veines et toi, qu’est-ce que tu fais ? Tu ne penses qu’à toi ! Tu t’ la coules douce ! Tu parades ! Il va falloir que tu changes ! Que tu arrêtes de tout concentrer sur toi ! Etc. ! »

La litanie de l’ego est sans fin ! Elle fonctionne comme un marteau-pilon ! Dans le cosmos ! Les Vénusiens, eux-mêmes, l’entendent ! Ils demandent : « Mais qui fait du bruit comme ça ? C’est encore les Terriens, j’parie ! Oh ! Oh ! Les Terriens, un peu d’ calme ! Y en a qui ont besoin d’ s’ reposer ici ! Foutus Terriens ! »

Et les Vénusiens marmonnent, mais les Terriens n’arrêtent pas ! Et l’ego continue d’assommer la lumière ! Il veut faire peur à la lumière ! Il veut l’écraser ! Car l’ego cherche le pouvoir, le commandement ! Et le monde décrit par l’ego devient terrible ! Si on en croit l’ego, les hommes ne connaissent pas le plaisir ! Ils travaillent, c’est tout ! Ce sont des forçats ! Toute la journée à pousser les wagonnets d’ soufre ! Ils sont pleins de poussière et ils suent et ils toussent !

Vision qui fait frémir la lumière ! Elle qui veut aimer, chanter, jouer les cigales ! « Oui, le monde est terrible ! dit l’ego, qui se dresse au-dessus de la lumière, tel un manteau de nuit ! La vie te réduira en miettes ! Elle te plongera dans les oubliettes ! Malheur à celui qui s’écarte du devoir !Malheur à celui qui ne travaille pas ! Malheur à l’innocence, la naïveté ! »

La lumière, qui aime le soleil et les papillons, se met à trembler ! Elle ne se rend pas compte du cauchemar qui l’attend ! Elle maudit ses rêves, sa candeur ! Elle se frappe la poitrine pour s’endurcir, pour se préparer au pire ! L’ego a parlé, a montré la réalité ! La lumière se sent coupable d’être !

Mais est-ce possible ? Peut-on naître erreur de la nature ? Peut-on se détruire fondamentalement ? Peut-on être totalement mauvais ? Les ruisseaux et la mousse, la feuille émeraude, c’est de la bouse ? C’est que des cellules et des électrons ? C’est « nada », pour plaire au physicien ou au généticien ? La lumière s’interroge ! Elle veut se jeter par la fenêtre, car elle se hait d’exister ! Elle se trouve si bête, si inutile !

Les Vénusiens sont encore obligés d’intervenir :

« Oh ! Oh ! crient-ils à la lumière.

Vous n’allez pas sauter et faire la conne !

Manqueriez plus que vous atterrissiez sur not’ barbecue !

_ Z’avez raison ! dit finalement la lumière. Y a mieux à faire !

Et d’abord une enquête !

Car peut-on vivre sans plaisirs ?

_ Non ! répondent en chœur les Vénusiens.

_ C’est bien c’ que j’ pensais ! »

Voilà la lumière qui prend sa loupe, sa pipe et sa casquette, et qui commence ses investigations ! « Hum ! Hum ! se dit-elle. Voilà des traces de plaisirs Laissées par l’ego ! Elles mènent où ? » La lumière ouvre une porte et qu’est-ce qu’elle voit ? L’ego est là dans le cosmos ! C’est une statue d’or, qui sourit en s’admirant ! qui ruisselle de vanité et de complaisance ! qui brille de mille feux devant la glace ! Et à ses pieds des millions d’esclaves s’empressent, s’épuisent, meurent, pour essayer de la satisfaire !

De temps en temps, l’ego en écrase un ou le croque, ce qui fait que le sang se mêle à l’or ! La lumière n’en croit pas ses yeux ! Elle est épouvantée ! Elle qui est si naïve, si bête aussi ! « C’est la vie dure ! » se dit-elle. Mais soudain l’ego la voit et le meurtre apparaît dans ses yeux ! Il doit maintenant tuer la lumière, car il ne faut pas qu’on sache qui est vraiment l’ego !

Tout s’explique ! Le monde est chaos pour plaire à l’ego ! Et la lumière ? Elle rase les murs et surveille son dos ! L’ego est l’animal dévoreur de cerveaux ! Son hypocrisie est reine !

« Ouais ! Ouais ! fait un Vénusien. J’ savais bien qu’ les Terriens n’étaient pas « clean ! » Ici, au moins on est sérieux ! On bosse ! »

 

 
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