L'Enfant et la lumière (I, II, III, IV)

  • Le 27/11/2021
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Dytique

 

 

 

    Avertissement: revoilà L'Enfant et la lumière sous la forme d'un quasi conte de fées, parce que c'est ce qui m'amuse en ce moment... Cariou reviendra plus tard, il ne perd rien pour attendre!

 

                                                 I

                                         Le dytique

 

    L'enfant était assis au bord du ruisseau. Sous le feuillage émeraude, il écoutait le murmure apaisant de l'eau et regardait des poissons, sous les taches de lumière qui doraient le fond. A côté flottaient des étendards de vase, mais l'enfant était triste! Il était comme accablé, assommé même et il ne comprenait pas pourquoi! "Comment se fait-il, soupira-t-il qu'ici tout est beau, doux, merveilleux, alors que chez moi, dans ma famille, il y a autant de bruit, de fureur et de douleurs? Comment est-ce possible? Cela n'a pas de sens!"

    Ainsi parlait l'enfant et il lui semblait que le ruisseau l'écoutât, mais ce fut un gros dytique qui lui répondit! Il était venu à la surface, chercher sa bulle d'air, et il avait aperçu l'enfant qui avait un sanglot! "Tiens! avait-il pensé. Voilà un enfant bien triste! Je vais essayer de le consoler!" "Eh! l'enfant! cria-t-il. Pourquoi tu ne t'amuses pas? C'est l'été ici, la fête de la lumière! Ecoute les oiseaux comme ils chantent! Ne sont-ils pas heureux! Et les fleurs? Ne sens-tu pas leur délicieux parfum? Et moi, je ne me porte pas mal non plus! Alors, qu'est-ce qu'il y a ?"

    L'enfant fut très surpris, car il n'y avait personne autour de lui! "Qui parle? demanda-t-il.

    _ Par ici, dans l'eau! cria de nouveau le dytique."

    L'enfant, enfin, découvrit l'insecte... "Mais, mais tu parles? fit étonné l'enfant.

    _ C'est vrai, quand j'ai quelque chose à dire... Mais tu sais, chacun ici discute! Suffit de tendre l'oreille! Mais, dis-moi, pourquoi as-tu l'air d'être l'enfant le plus triste du monde?

    _ Mais... je ne sais pas moi-même! A la maison, tout n'est que heurts, sévérité et même violence! Apparemment, je ne fais jamais bien les choses! Je suis vilain, méchant, menteur, fourbe et j'en passe! Or, je ne suis rien de tout cela! Je ne veux qu'être gentil... et c'est pourquoi j'aime cet endroit et toute la beauté que j'y trouve!

    _ Oui, j'aurais dû comprendre tout de suite... ton cas, si je puis dire! Tu te sens un étranger chez toi, c'est bien ça? Le problème, c'est que chez toi, c'est le monde des Pierres!

    _ Le monde des Pierres?

    _ Oui..., mais c'est un peu compliqué tout ça... et je ne suis qu'un dytique! Pour bien t'expliquer les choses, il faudrait que tu ailles voir le magicien de la forêt! Il s'appelle... il s'appelle Galorn! Il est quasiment incollable!

    _ Mais... où pourrais-je trouver ce magicien?

    _ Eh ben, dans la forêt!

    _ Mais où ça dans la forêt!

    _ Oh! Oh! Tu trouveras de toute façon! Moi, j'ai ma bulle d'air... et ma famille qui m'attend, au fond de l'eau! Reviens me voir, quand ça te fera plaisir! On discutera plus longuement!"

    L'enfant vit disparaître le dytique et se releva... "Je vais chercher le magicien Galorn, car j'ai besoin qu'on réponde à mes questions... Je ne peux pas continuer à être triste comme ça... C'est bien trop de peine!"

 

                                                                                                         II                                      

                                                                                                   La Loche

 

     L'enfant marchait dans le bois et autour les premières feuilles tombaient doucement. De temps en temps, un oiseau venait voir le visiteur et celui-ci remarquait alors une boule de plumes claires, l'œil noir et profond du rouge-gorge ou le bleu vif du geai! De petits chants singuliers charmaient l'oreille et donnaient aux branches un air de fête, mais l'enfant se sentait tout de même étranger et il voulait vraiment rencontrer le magicien Galorn, pour avoir des réponses, mais où le trouver?

    A cet instant, l'enfant manqua de marcher sur une énorme loche orange, qui traversait le chemin! "Eh bien , ma pauvre loche, tu l'as échappé belle! dit l'enfant. Pour un peu, je te marchais dessus! Rassure-toi, ma brave loche, je ne te vais pas t'écraser comme certains enfants méchants, qui n'ont que dégoût pour toi, ce qui n'est pas mon cas! J'ai bien trop conscience de ton effort... Mon dieu, comme tu es lente! Si j'avais ton rythme, je ne verrais pas le magicien Galorn avant la fin de l'année! Hi! Hi! Mais, au moins, tu es patiente!

    _ Moi? Mais pas du tout! J' suis une fonceuse, même que ça m'a déjà joué des tours!

    _ Hein? Mais qui parle?

    _ Mais moi, la loche! Et si je le fais, c'est parce que j'ai vu que tu m'aimes bien!

    _ Mais oui! Mais, excuse-moi, j'ai tout de même à croire que tu es une fonceuse! Hi! Hi!

    _ C'est parce que tu n'es pas à mon échelle! Tu vas où?

    _ Chez le magicien Galorn... Mais je ne sais pas où il habite!

    _ Et voilà la jeunesse: ça cause et ça ne sait pas! Mais monte sur mon dos! Moi, je vais t'emmener chez Galorn!

    _ Tu veux que je monte sur toi? Mais je vais t'écraser!

    _ Puisque c'est moi qui te le demande! Fais-moi confiance!"

    L'enfant regarda la loche qui rampait sur le sol... Il hésita, puis leva une jambe... "Je vais en faire de la bouillie!" pensa-t-il. Puis, il posa le pied dessus, comme on le lui avait dit, et d'un coup, il se retrouva sur le pont d'un immense navire! "Alors, qu'est-ce que t'en penses, fiston? demanda la loche.

    _ C'est... c'est incroyable! répondit l'enfant, qui voyait au loin la tête ou la proue!

    _ Tu sens l'air du large?

    _ Oh oui! Nous allons vite!

    _ Jette un œil au sillage!

    _ Il est brillant! cria l'enfant qui s'était déplacé.

    _ Spécialité maison! Reviens vers moi maintenant! Eh! C'est qu' j' en ai connu des océans! J'ai affronté toutes les mers! toutes les touffes d'herbe, je veux dire! Il y a des zones de calme, avec des feuilles multicolores..., des marées basses terreuses, où j'échoue parfois! Mais évidemment, ce que je préfère, c'est la vague d'herbe, bien ruisselante! Là, je glisse parfaitement! Je montre tout mon sens marin!

    _ Mais j'en vois une justement! Elle est très haute! On dirait qu'elle va déferler!

    _ En effet, c'est un joli monstre! A l'assaut fiston! Accroche-toi!"

    L'enfant se coucha sur le pont et trouva des prises dans la peau même de la loche. Puis, ce fut l'escalade, contre les brins d'herbe qui retombaient déjà, menaçant d'engloutir la loche! Mais celle-ci émergea soudain en haut de la touffe! "Waaaohh! Fiston! T'as vu ça? Domptée la vague! T'es encore là?

    _ Oui... oui, balbutia l'enfant, qui était tout mouillé et qui avait cru un moment qu'il allait se noyer!

    _ Hein? Et toi, qui me voyais comme un modèle de lenteur! C'est du sport, ça non? T'as pas le mal de mer, dis?

    _ Non, non, mentit l'enfant, qui sentait maintenant son estomac dérangé!

    _ De toute façon, on est arrivé! On débarque! Il te suffit de poser le pied par terre!"

    Ainsi fit l'enfant et il reprit sa taille normale. Il regarda la loche et lui dit: "Merci la loche! Ce fut une expérience inoubliable!

    _ Pas de quoi moussaillon! Tu seras toujours le bienvenu!"

    La loche continua sa route et l'enfant découvrit une vieille maison en pierres, celle du magicien Galorn!

 

                                                                                                        III

                                                                                                    L'épeire

 

    "Halte là!" A ce cri l'enfant s'arrêta net et chercha qui s'adressait à lui. Soudain, dans le coin de son œil droit descendit une épeire, reconnaissable à son abdomen comme un petit œuf! "Et maintenant, tu me vois, je suppose..." dit l'araignée.

    _ Oui, oui, balbutia l'enfant, qui n'osait bouger.

    _ Bien! Mais tu allais déchirer ma toile! Tu fonçais dessus!

    _ Mais...

    _ Mais, il n'y a pas de mais! Il faut que tu saches une chose... Je travaille... et tu dois respecter mon travail!

    _ Bien sûr! Mais...

    _ Mais, il n'y a pas de mais! Je ne file pas pour m'amuser, mais pour chasser, ce qui me permet de me nourrir, et donc ma toile n'est pas une cible pour les enfants!

    _ Je ne l'avais pas vue!

    _ Parce que tu allais trop vite! Le temps, pour toi, n'existe pas! Seuls comptent ton besoin ou ton envie! Il faut que tu te calmes et j'ai un bon moyen pour ça! Tu sais compter?

    _ Mais oui, évidemment!

    _ On va voir ça!"

    L'épeire sauta sur sa toile et montra à l'enfant un collier de perles de rosée: "Tu comptes combien de gouttes? demanda-t-elle.

    _ Hein? Euh... fit l'enfant, qui écarquillait les yeux pour mieux voir.

    _ C'est comme un boulier! Je vais faire glisser les perles une à une... Attention!

    _ Une, deux, trois... Eh! Moins vite! quatre, cinq..."

    L'enfant marmonnait ses nombres et s'écria: "Vingt! J'en ai compté Vingt!

    _ Bon! Sachant que la toile comporte, entre ses quinze rayons, trente branches et qu'on perd deux gouttes à chaque fois qu'on se rapproche du centre, cela nous fait combien de gouttes au total?

    _ Oh! Là, là! Je perds le fil!

    _ Mais monsieur est un malin! Si, si, monsieur est un malin! Il perd le fil d'un problème d'araignée!

    _ En tout cas, c'est magnifique!

    _ Vrai? On m'a déjà dit que j'avais quelque talent!

    _ On dirait un nuage de rosée!

    _ Voilà le titre que je cherchais! Car je veux exposer, tu sais! Je rêve qu'on défile devant mes toiles et qu'on s'extasie à la vue de Nuage de rosée! Hem! Peut-être es-tu plus doué pour la littérature que pour le calcul!

    _ J'aime beaucoup lire!

    _ J'en étais sûr! Et tu as l'air d'un garçon bien élevé! Mais maintenant ma toile est vi... vi...?

    _ Vivante!

    _ Oui, l'art anime les choses, c'est entendu! Mais ma toile est vi... visi...

    _ Visible!

    _ Bravo! Et si elle est visible, on fait le... le....?

    _ Le... le... Le spectateur!

    _ Oui, mais non! On fait... On fait le tour!

    _ Ah?

    _ Oui, allez, allez, je te surveille! Voilà, il fait un pas, puis un autre... N'est-ce pas merveilleux?"

    L'enfant marchait avec prudence et il dit: "Au revoir!", mais l'épeire ne lui répondit pas! Elle était sans doute trop occupée!

 

                                                                                                   IV

                                                                                           Le magicien

 

    Soudain, l'enfant fut devant la porte de la vieille maison et il se trouva fort intimidé. Il frappa cependant et il y eut un bruit de casseroles renversées! Puis, brusquement la porte s'ouvrit et un vieillard hagard, avec une longue barbe grise, apparut! "Vous avez mes poils de rat? demanda-t-il.

    _ Non, je... Bonjour... bredouilla l'enfant.

    _ Non, bien sûr, vous n'avez pas mes poils de rat! Car vous n'êtes pas non plus mon livreur! Mais, sans mes poils de rat, je suis cuit!"

    Puis, il retourna à l'intérieur, où finalement l'enfant, ne sachant que faire, le suivit. C'était un vrai capharnaüm! Partout pendaient les choses les plus hétéroclites et on avançait avec précaution, dans un dédale de coffres, de paniers et d'outils! En plus, il y faisait très sombre, car le jour n'était produit que par une petite fenêtre jaunâtre!

    Dans l'âtre, cependant, bouillonnait une grosse marmite, autour de laquelle s'affairait le vieillard. Il ouvrait de petits pots, sur le manteau de la cheminée, en disant:" Pas de poils de rat, pas de potion magique!

    _ C'est une potion pour quoi? s'enquit l'enfant.

    _ Contre! C'est une potion contre les rats! Figure-toi qu'une famille de rats prend ma maison pour un hôtel de luxe! On ne la voit jamais, car elle fait la fête toute la nuit et dort dans la journée! N'est-ce pas une vie magnifique? Mais elle laisse ses crottes partout! Est-ce que tu sais que les rats aiment se rouler dans leurs déjections!

    _ Pouah! C'est dégoûtant!

    _ En effet! Mais, au fait, qu'est-ce que tu fais là?

    _ Eh bien, le dytique m'a dit que vous pourriez m'aider...

    _ Le dytique! Comment il va?

    _ Mais... bien...

    _ Parfait! Une fois, je l'ai capturé, car je voulais le voir dans un bocal... Il m'a pincé si fort que j'ai dû le lâcher! J'en frémis encore rien qu'à m'en souvenir!

    _ C'est normal qu'il se soit défendu... Chacun aime sa liberté!

    _ Oh! Oh! Voilà un garçon bien éveillé pour son âge! Nous avons peut-être là un futur philosophe! Et pourtant, tu aurais besoin d'aide?

    _ Euh... C'est-à-dire... Ce n'est pas facile à expliquer... Mais je suis malheureux chez moi! je ne comprends pas la dureté de mes parents!

    _ Ils sont inquiets...

    _ Oui, je vois ce que vous voulez dire... Mais ce n'est pas seulement ça, ils sont aussi injustes! Ils me traitent comme un méchant, alors que je ne le suis pas! Ils ne sont pas honnêtes avec eux-mêmes! Ils ont des plaisirs qu'ils ne s'avouent pas!

    _ Eh ben! Si tu as les yeux aussi ouverts, c'est parce que tu ne fais pas seulement partie de leur monde! Tu es peut-être un enfant lumière!

    _ Un enfant lumière?

    _ Oui, écoute, il y a deux royaumes, celui des Pierres et celui de la Beauté! Toi, tu serais entre les deux... Tu ferais la liaison, d'où ta position inconfortable! ton sentiment douloureux d'être étranger!

    _ Je ne comprends pas...

    _ Cela n'a rien d'étonnant! Les plus grands savants ignorent aussi ces choses! Car, note bien, tu me vois et tu parles au dytique, mais pour les Pierres, c'est impossible! ce qui prouve que tu es bien différent!

    _ Ah?

    _ Oui, ah! J'avais d'anciens poils de rat, j'en suis sûr! Mais où sont-ils?

    _ Mais... mais qu'est-ce que je dois faire? Est-ce que je suis vraiment un enfant lumière?

    _ Hum! J'ai des relations auprès de la reine Beauté...

    _ La reine Beauté?

    _ Et tu vas répéter tout ce que je dis...?

    _ Excusez-moi...

    _ Je vais donc demander à mes relations de parler de ton cas à la reine Beauté! Et quand il y aura des réponses, on te contactera!

    _ Merci!

    _ Maintenant, il est temps que tu rentres chez toi, car le soir tombe! Les voilà, mes anciens poils! Tu portes chance, c'est bon signe!"

 
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