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    Demain

     

     

        Demain, nous nous marierons. Nous ne serons plus seul et notre femme sera superbe! Nous suivrons avec plaisir ses jambes fuselées et ses hanches aussi sensuelles que puissantes, car elles sont encore destinées à la maternité! "Que regardes-tu?", nous demandera-t-elle de sa voix douce, tandis que le parfum de sa chevelure nous enveloppera... Qu'est-ce que nous regardons?  Comme si elle ne le savait pas!

        A l'instar de la plupart des autres femmes, la nôtre sera naturellement pratique! Elle nous écoutera avec respect, pour prendre notre mesure, et elle nous dira ce qu'il faut faire! Ne sommes-nous pas allé vers elle? N'avions-nous pas un manque? Ne cherchions-nous pas des réponses? Ne voulions-nous pas d'une autre vie? N'était-elle pas et n'est-elle pas toujours pour nous l'espoir, la solution, l'image du bonheur et celle de l'avenir?

        Notre femme nous parlera et nous réveillera! Elle nous dira: "Il faut se battre! Il faut que tu t'investisses, parce que la beauté de ton œuvre, de ton travail, doit être diffusée, doit être connue! Il faut que tu t'imposes, car tu le mérites! Des choses laides ont du succès et ce n'est pas normal! Oui, il est nécessaire de jouer des coudes, de parfois taper du poing sur la table, si on veut un monde meilleur! Tu seras fort et je t'aimerai encore plus! Viens!"

        Ce sera comme sortir d'un mauvais rêve, d'un cauchemar même! Nous n'étions rien et nous donnerons raison à notre femme! Nous nous mettrons en marche! Nous téléphonerons prêt à toutes les rebuffades! Nous serons enfin dans l'action, dans le mouvement des autres! Nous ne nous sentirons plus exclu et nous aurons l'impression d'être guidé par la bonté! Nous rayonnerons et à ce rythme, nous finirons par trouver une galerie, qui acceptera de nous exposer!

        Les choses se passeront ainsi... Nous arrivons à l'adresse et nous faisons face à une femme... Nous fermons les yeux sur sa laideur, qui est plus intérieure que physique; la première entraînant de toute façon la seconde... Nous savons, dès le premier regard, que cette femme fait partie des tyrans, qu'elle ne voit pas plus loin que son égoïsme et que c'est justement là son drame!

        Elle reste prisonnière de son amour-propre, de son orgueil! Mais nous passerons outre... De même, nous ne voulons pas voir la pauvreté, la médiocrité, la malhonnêteté, la suffisance des peintures qui sont déjà sur les murs et qui indiquent pourtant que la propriétaire des lieux est sans goût et qu'elle ne connaît rien à son métier! Nous oublions ces horreurs, car nous ne devons pas rater l'opportunité qui s'offre à nous! Il ne s'agit pas de rentrer les mains vides, penaud et amer, avant d'inquiéter notre aimée avec nos explications embarrassées!

        Courage! Concentrons-nous tout au contraire sur la galeriste! Dévorons-la des yeux, comme si elle était une divinité irrésistible! Ecoutons-la comme un oracle! C'est elle le personnage important, la véritable créatrice... N'est-ce pas elle qui prend les principaux risques? Quel est le combat du peintre, d'un rêveur, auprès du sien? Soyons à son égard comme l'écrivain auprès de son éditeur: jouons les caniches!

        Qu'elle nous coince entre deux dates, que nous devions encore nous occuper de la publicité, bien qu'elle profite aussi à la galerie, peu importe! Sourions! Plaignons même celle qui nous parle, car elle rencontre bien des difficultés! Puis, saluons et disparaissons, comme si nous quittions le grand vizir lui-même... Le principal est atteint, quoiqu'on nous déteste déjà, mais nous exposerons!

        Nous rencontrerons aussi des journalistes... Ils viennent tels des nababs dérangés..., à la demande de la galerie, à cause d'un accord tacite, parce qu'ils ont besoin d'un sujet et nous d'un article! Ils flairent, ils sont maussades, il faut les séduire! Ce sont eux les héros du jour! Entre deux Watergate, ils sont là pour la corvée! Ils représentent le pouvoir, qui a les narines sensibles, le ventre délicat, sujet aux gaz!

        Ils jettent à peine un coup d'œil! Ils cherchent en vain un intérêt, car au fond une seule chose les anime: eux-mêmes! Ils veulent se sentir importants, sur les marches de l'Olympe! Puis, soudain, ils ont des airs de Gestapo: avons-nous un CV, une fiche de renseignements? Bien sûr, nous savons qu'il faut leur mâcher le travail et qu'ils écriront leur article essentiellement à partir des documents que nous leur fournirons...

        Mais c'est la traditionnelle photo et nous prenons la pose. Le journaliste baisse son appareil, découragé: ne pouvons-nous pas être plus photogénique? Il prend tout de même son cliché, avant d'afficher une légère grimace de dégoût, en contrôlant son exposition! Après leur départ, nous gardons l'impression d'avoir déçu, mais, malgré toute notre politesse, il nous est impossible de feindre l'admiration! 

        Cependant, viendra le jour du vernissage... Des dizaines de gens seront là et il faudra leur parler, paraître à l'aise, ouvert, disert, aimable... Nous ne convaincrons point toutefois: ce qui est forcé n'attache pas! et on nous quittera bientôt... Nous maudirons alors notre misanthropie, relent d'une époque passée! Nous nous interrogerons une nouvelle fois sur notre étrange handicap ou sur le secret de plaire! Comment font les autres, pour s'entendre aussi bien? Ils sont dans une autre dimension; une pellicule invisible nous en sépare!

        Mais, entre-temps, nous aurons aussi beaucoup subi... Des têtes boursouflées, des yeux vides, des crânes difformes, des corps malingres, des êtres immenses et indifférents, toutes sortes d'animaux en somme, nous auront dit, au sujet de notre peinture: "C'est vraiment sympa!", "Moi, je peins surtout avec du blanc... et mes toiles sont plus grandes!", "Vous me rappelez... Comment il s'appelle déjà? Euh...", "C'est pas mal..., mais ça manque de portraits, c'est quand même l'homme le plus important... Enfin, je crois...", "Si seulement vous aviez mis une touche de bleu là! Hein? Armand, qu'est-ce que t'en penses!" "Tu as raison, ma chérie, comme toujours...", etc.  

        Où seront l'humilité, la véritable curiosité, la profondeur; le manque aussi, la souffrance qui conduisent à la recherche, au désir de comprendre? Nulle part! La beauté ne se donne pas aux égoïstes, car ils n'en ont pas réellement besoin! Et c'est peut-être cela qui finalement constitue le monde qui nous est étranger... Sa matière, son air sont produits par des égoïsmes qui s'abouchent, fusionnent; ainsi que des placentas tardifs! Seuls les êtres inaboutis, encore indistincts, peuvent se plaire à ce point, dans la même illusion! Seuls ceux-là aussi sont capables de haïr et de mépriser les autres sans états d'âme, de sorte qu'ils les rejettent totalement! L'injustice est enfantine!

         La maturité, elle, a forcément des aspérités, comme toute construction; ce qui ne l'empêche pas d'être solidaire, bien au contraire, à cause de sa responsabilité! L'individualisation n'est pas de se concentrer plus sur soi-même, ni de se vouer un culte! Elle est un échange permanent entre ce qu'on peut saisir de soi et le monde extérieur... C'est un regard universel!

        Elle est tout le contraire d'une fermeture, d'un repli, d'un refuge! C'est un pas en avant, c'est la véritable naissance, puisqu'on déchire l'enveloppe des conventions, pour explorer l'inconnu! C'est accepter sa peur et montrer du courage! Ce n'est pas se choyer, ni se croire important! C'est devenir unique, c'est se différencier, c'est entendu, mais pour l'avenir commun!

        C'est l'homme qui est concerné, pas l'individu! L'individualisation permet la connaissance; elle dresse vers le ciel, donne les clés de la liberté! L'égoïsme, lui, s'enlise, s'enfonce dans la nuit! Il a soif, il veut mordre et le fiel lui vient à la bouche! Son rire est toujours moqueur! L'individualisation, elle, n'a pas d'autres issues que la paix et son corollaire, la douceur!

        Mais nous reviendrons sur Terre et nous regarderons où est notre femme, parmi cette assemblée... Elle y sera si à l'aise que nous la verrons soudain telle une étrangère! Mais nous chasserons bien vite cette vision, c'est nous l'ours, le mal-léché, le perdant! C'est nous qui voulons en sortir! C'est nous qui sommes las de la solitude! C'est nous le paria, l'inadapté!

        Avec le temps, nous nous ferons peut-être un nom... Nous commencerons à vendre, comme on dit... et notre femme et nous-même, nous déciderons de fonder une famille, tels les animaux quand ils jugent les conditions favorables! Pour notre femme d'ailleurs, ce sera un accomplissement supplémentaire... et d'après elle encore, il est bon d'être responsable d'un autre, pour cesser de ne penser qu'à soi!

        Nous aurons donc des enfants et nous pénétrerons toujours davantage l'univers de notre femme! Nous suivrons sa grossesse, déchiffrerons ses échographies, serons dans son ventre! Nous créerons moins certainement, mais une nouvelle aventure sera là, peut-être la seule valable! Nous chaufferons les biberons, nous changerons les couches, nous ferons manger la bouillie, enfin humain!

        Nous conduirons à l'école l'âme de notre âme! Nous écouterons ses professeurs, par peur des représailles! Nous aiderons aux devoirs, nous fêterons Noël, nous nous promènerons le dimanche! Nous aurons un chien et il ira devant, telle une étrave!

        Nous saluerons quelques connaissances, des gens respectables, comme nous! Mais nous formerons un clan, avec ses règles et fier comme s'il était seul au monde et nullement infime dans le cosmos!

        Les années passeront, idéales, sans être vues! Certes, il faudra parfois courir; les enfants causent du soucis, surtout quand ils commencent à être eux-mêmes (quelle idée!), mais ainsi l'angoisse ne nous rattrapera pas, ou plutôt son objet ne sera plus notre personne, mais la famille, qui bientôt rira de ses peurs! Notre ciel ne sera plus lancinant et sombre, à moins que le deuil ne nous frappe... et encore!

        Nous aurons aussi des amis, ceux de notre femme s'entend! Nous nous réunirons entre couples, les enfants virevoltant! Nous ferons bonne chère, échangeant des regards complices, symboles de notre réussite!

        Un jeunot fera du plat à notre épouse et nous serons fier et content pour elle! Les hommes parleront avec des voix chaudes, les femmes deviendront rêveuses, à cause d'un souvenir, d'un regret peut-être... Le soleil se couchera et nous serons comme dans une comédie du cinéma français... Nous nous sentirons mûrs et proches de la vérité, parce que le soir descendra, telle une petite mort!

        Un homme, pour gravir les échelons, essaiera de détruire notre réputation de peintre... ou d'écrivain. Une polémique s'ensuivra... et toujours soutenu par notre femme et maintenant par nos enfants, nous nous battrons! Nous aurons notre ennemi, notre croquemitaine! Nous vaincrons et nous aurons même droit à une monographie!

        Notre talent sera devenu sûr et il sera défini, puis classé par certains... Nous entrerons dans l'histoire, comme on étiquette un bocal, avant de le ranger! Notre devoir sera accompli et nous gonflerons les poitrines de notre famille, au point de trouver normal de partir, de tomber malade! L'usure sera chez nous en premier, pour correspondre aux statistiques, qui disent que les femmes vivent plus longtemps!

        Nous déclinerons, nous deviendrons dépendant, mais ce sera encore l'occasion d'éprouver le dévouement de nos proches... Pourtant, plus nous serons faible, plus ils se rapprocheront et plus nous aurons l'impression qu'ils sont comme des vautours! La peur nous fera bien vite chasser cette pensée! L'héritage cependant...

        Mais voilà notre mort! La regarderons-nous en face? Aurons-nous quelque idée de son sens, de sa nature; de Dieu? Aurons-nous encore de la foi? Serons-nous digne, avec une formule pour la postérité? Tiendrons-nous une dernière fois notre pinceau, tel le soldat tombant avec son fusil? L'épouvante nous donnera-t-elle des regrets? Les yeux doux de notre femme, l'attention de nos enfants ne seront-ils pas l'image de l'éternité, en ce que la descendance nous perpétue?

        Ne nous dirons-nous pas que nous nous sommes laissé au bord de la route; que nous avons abandonné une part de nous-même; celle qui nous inquiétait le plus, nous paraissait la plus difforme, la plus bizarre, la plus scandaleuse, la plus dangereuse; celle qui voyait la laideur, le mal, le mensonge, la bêtise; celle qui ne supportait pas les psychologues, les psychanalystes, ces farceurs! celle qui honnissait les cadavres du pouvoir, les marionnettes de l'argent! celle qui vomissait devant les amoureux d'eux-mêmes et de leur sexe! celle qui se frottait au tyran chaque jour, qui lisait au plus profond des cœurs, qui avançait vers la vérité, qui cherchait de véritables solutions, qui avait une idée juste du progrès! celle qui était lucide, qui rafraîchirait les générations suivantes, qui serait un source d'espoir et de paix!

        Celle qui aurait essayé de comprendre Dieu, de l'aimer et donc d'aimer les autres aussi! celle qui admirait la beauté infinie de la nature et trouvait fous les hommes! celle qui s'enchantait des lois de la sagesse!

        Mais demain nous nous marierons... et ce sera comme se réveiller d'un mauvais rêve, d'un cauchemar!

     

  • Observons!

    Observons

     

     

     

     

        Observons! Observons! Comme les autres n'ont pas inventé l'eau chaude, ou plutôt comme ils ne savent pas ce que nous savons, car nous le saurions, ils n'ont qu'un équilibre, c'est celui de leur domination, et cela veut dire qu'ils ne "tiennent debout" que par rapport à l'impression qu'ils produisent... Ils ne peuvent être calmes et sûrs d'eux par leur seule richesse intérieure; ils croient qu'ils sont importants et même qu'on leur doit quelque chose!

        Ils vivent somme toute dans un rêve, une illusion, car la vérité, ce n'est pas le travail, les gilets jaunes, Roland-Garros ou les maniaqueries de Trump! La vérité, c'est que nous sommes sur une planète perdue dans l'immense espace, qu'elle tourne plus vite autour de son soleil qu'une Formule 1 et qu'a priori la vie se termine par la mort! Voilà la vérité! A partir de là, la société n'est qu'une construction, destinée certes à nous faire vivre ensemble, dans les meilleures conditions, mais elle n'est rien de plus et certainement pas un but en soi!

        Mais alors pourquoi les choses ne changent-elles pas? Pourquoi ne sommes-nous pas curieux de trouver des solutions, un sens à la vie? Pourquoi ne nous tenons-nous pas devant notre abîme, tels des gens raisonnables sur leur balcon, se demandant si celui-ci est bien solide ou si le point de vue mérite un intérêt? Pourquoi le monde paraît-il aussi irresponsable et aussi aveugle?

        Il n'y a qu'une réponse à cela! La plupart ne veut que s'amuser, nullement se tracasser, ni encore moins avoir peur! Tout au contraire, être le centre d'intérêt, être aussi bête que l'animal qui triomphe sur un autre, est son souhait le plus cher!

        La majorité veut le monde à son échelle et tient absolument au fonctionnement qui lui permet de gravir les échelons! Elle rêve de jouer les vedettes, les premiers rôles et ceci est même valable pour les gilets jaunes, car malgré leur révolte ils sont encore les bases de leur futur!

        Mais notre quotidien est donc factice, puisqu' il ne prend pas en compte tout le réel! L'angoisse de notre situation notamment est là parmi nous, larvée, quoiqu'agissante, et il est incroyablement intéressant de la repérer chez chacun! C'est la vérité qui parle! Observons donc! Observons comment chacun se comporte, marche, parle, gesticule! Puisque nul apparemment ne cherche les bonnes réponses, nul n'a un équilibre vrai! Les manières, les attitudes trahissent le mensonge, le vide, l'ignorance!

        Soyons comme des chiens, pour traquer la pose, le m'as-tu-vu, la plaisanterie! Ne nous laissons pas tromper par les artifices du gibier! La truffe frémissante, tenons-nous aux aguets, car le spectacle commence, les clowns font leur numéro sur la planète Terre! La rue est un théâtre, avec ses bourgeois, ses pauvres, ses soubrettes et même ses assassins! Ayons l'œil ouvert, non pour dominer, et c'est ça la nouveauté, mais pour comprendre, regarder l'autre dans son entier, pouvoir sincèrement respecter, être distinct, responsable, sans haine, n'écrasant a priori personne, pour devenir mature, c'est-à-dire quelqu'un qui travaille à faire évoluer la matière vers l'esprit, quelqu'un qui de l'animal passe peu à peu à l'homme! Grande nouveauté!

        Tenir sur ses jambes, hors de la bulle de l'égoïsme, avec la conscience de l'Univers et de la mort, c'est pas beau ça? On ne fatigue plus personne! Par contre, que d'inimitiés on se crée! Que de haine on provoque! Que de mépris, que de regards meurtriers on suscite! Ben ouais, on n'est plus un esclave; on a quitté le rayon jouet! On n'est pas l'admirateur de ces messieurs-dames! On est le vent du Nord pour l'égocentrique, celui qui vit comme une araignée au milieu de sa toile! On est le ciel rayonnant pour le poids de fonte de l'égotisme! On échappe aux morts-vivants! Ils enragent, ils trépignent, ils suent et c'est de leur faute: ils ne cherchent pas!

        Il faut lutter, sinon on finit par croire, comme les gilets jaunes, que c'est la société qui nous mène, qu'elle a les réponses, qu'elle est sérieuse, qu'elle est l'obstacle! Il faut lutter, sinon on finit par trouver normales toutes les calembredaines qu'on nous sert, tout le tapage de chaque jour, comme si les uns et les autres ne s'efforçaient pas de briller, comme si nous n'étions pas tous embarqués sur le navire Terre, comme si nous n'étions pas tous nos propres commandants, comme si la ville n'était pas au fond qu'un décor!

        Il faut lutter pour rester soi-même, pour ne pas être endormi, englouti par le discours ambiant, le fonctionnement général, qui sont surtout créés par la peur de l'inconnu, l'étroitesse des privilèges, la paranoïa du pouvoir!  Nous discutons avec véhémence au-dessus de la table, alors que nous dérivons au milieu de l'océan! Nous ne savons pas et nous martelons nos paroles! Nous sommes invités à être créateurs et nous ne quittons pas le troupeau! Nous refusons la nouveauté, quitte à détruire!

        Il faut lutter pour ouvrir les yeux, voir toute sa situation, sa liberté, son indépendance! Peu ose l'aventure de l'individualisation! Règles, dogmes, sainteté et sacralisation mènent à la haine et à la violence! Il faut lutter pour s'affranchir de ses craintes et retrouver la souplesse, la confiance, la curiosité, l'enthousiasme de l'enfance! Il faut lutter pour ne pas perdre de vue le mal! Il est dans la folie, la maladie de ceux qui ne veulent pas s'éveiller, grandir... Il est dans les sangsues qui usent et pompent la vitalité des autres! Il est dans les cadavres qui appellent tout le monde dans leur tombeau!

        Les oppresseurs sont légion! La prochaine génération en est pleine! Quoiqu'il y ait une jeunesse saine, elle a ses malades et en sera destructrice, car voici venu le temps des monstres! Ils sont seuls et inadaptés! Ils sont impuissants, puisqu'ils ne communiquent pas, n'échangent pas, ne donnent pas! Le monde les terrifie et c'est pourquoi ils veulent à tout prix le dominer! Ils ne respirent que quand les autres leur sont soumis et les considèrent tels des dieux! Ainsi leur angoisse disparaît seulement s'ils sont les maîtres! Comment pourraient-ils ne pas être dangereux?

        Laids, ils brasillent à l'intérieur, comme le feu qui couve sous la bûche! Beaux, ils se dressent tels des pics enneigés et scintillants au soleil! Ils s'attendent à ce qu'on les admire, puisque eux-mêmes s'adorent! Ils ne comprennent pas qu'on leur résiste, d'où leur haine et leur mépris! Ils étouffent et fuient devant l'obstacle, car leur univers s'écroule! Mais qu'en sera-t-il quand ils auront la force des adultes? Au mieux, faute de moyens, ils seront sournois et feront le mal dans leur nuit, tels des rats! Au pire, avec du pouvoir, ils produiront des catastrophes et tueront des gens; car seul leur monde existe!

        La psychologie parle d'individus narcissiques, qui seraient l'objet de leurs propres pulsions sexuelles... et il est vrai qu'ils veulent d'abord qu'on vénère leur corps! Ils ne peuvent jouir qu'à cette seule condition, que s'ils disposent d'esclaves, et c'est pourquoi le sexe opposé les rebute, car la différence est synonyme d'étrangeté, de difficultés, de découvertes, de remises en question!

        Le confort est primordial chez "nos" monstres... et il est sans doute en rapport avec celui de nos sociétés, qui n'ont pas connu de guerre sur leur territoire depuis plus de soixante-dix ans! Suivons donc cette piste pour expliquer les choses, plutôt que de recourir à un tour de passe-passe psychanalytique, qui fait de toute façon référence à des événements improuvables ou faux; d'autant que la catégorie qui nous intéresse n'en est pas une véritablement, puisqu'elle nous englobe tous à des degrés divers!

        Mais nos sociétés connaissent la sécurité et c'est une situation inédite! Quand il y a des guerres, nous retrouvons nos instincts et malgré l'horreur, nous nous adaptons, car nous comprenons la menace, le combat et la soif de vaincre... C'est l'histoire quotidienne des animaux et donc de nos origines!

        De même, l'agression peut venir de l'intérieur, en temps de paix, si le régime en place empêche notre développement... et nous reprenons alors la lutte, jusqu'à ce que nous puissions jouir de notre liberté! Il nous faut bien des chefs, mais que leur pouvoir soit limité et que chacun ait les mêmes droits! Dans ce cas aussi, c'est notre instinct que nous suivons, c'est la domination qui pousse, c'est l'individualisation qui continue!

        C'est toujours la même chose quand nous voulons le confort matériel, l'aisance! Car la richesse révèle notre réussite, notre force; elle est notre brame, l'éclat de notre plumage, notre corne!

        Mais nous voilà aujourd'hui avec des frontières stables, en démocratie et disposant sans trop de peines d'un intérieur douillet! Le ventre ne crie pas famine et nous pouvons tous nous asseoir au soleil, pour regarder les autres et... nous en moquer! Nous devrions tous être pleinement heureux! Les difficultés que rencontrent les animaux, celles qui les mettent tout le temps sur le qui-vive, sont apparemment derrière nous! Et pourtant nous sommes tendus, nous faisons grise mine, des sirènes d'ambulances retentissent incessamment et certains en colère crient à la dictature!

        Eh! c'est que la paix est pour nous une nouveauté et qu'elle nous place insensiblement, mais inévitablement, devant notre originalité! La conscience est une inconnue qui nous crée de l'angoisse! L'absence de réponses se distille en nous et nous fait réagir plus ou moins bien et plus ou moins sincèrement!

        Nous pouvons, comme Trump et bien d'autres, nous empresser de retrouver la guerre, même si elle ne reste apparemment que commerciale! Nous voilà de nouveau "chez nous", pourrait-on dire! Nous pouvons aussi vouloir réaffirmer notre supériorité, en chantant cocorico! Le nationalisme, c'est comme de gros bras qui retroussent d'abord leurs manches, avant de "tabasser"!

        Nous pouvons encore consommer et consommer, mais pour cela il faut beaucoup d'argent et donc beaucoup d'égoïsme et beaucoup de saletés! Mais enfin tout ceci ne concerne principalement que les adultes... Qu'en est-il du côté des jeunes, dans ce monde soudain étrange et inquiétant, à force d'être "paisible", sans heurts, confortable, facile? Quelles fleurs apparaissent dans cette atmosphère trouble, car hypocrite, et néanmoins quasi ouatée, feutrée, que ne violente pas le "vent de la nécessité"? Entrons dans la serre, à nos risques et périls, il faut bien le dire!

        Qui se cache derrière les réseaux sociaux? Quelle chrysalide produit le ronronnement de l'ordinateur? Qui se mire dans son smartphone?

        En fait, peut-on imaginer des adolescents mieux armés que leurs parents face à l'angoisse? Evidemment non, ils sont fragiles et doivent d'abord apprendre... Ils copient donc les adultes et ceux qui sont les plus isolés, parce que sans doute leurs parents les méprisent ou échangent peu avec eux, n'ont qu'une manière d'être pour affronter le monde: ils se font le centre de celui-ci! Dans leur milieu protégé, ils deviennent leur dieu et parmi la foule, ils sont tels des trous noirs anonymes!

        Bien qu'ils veuillent incessamment asservir, ils n'ont pas le profil du chef! Ils n'en ont ni la puissance, ni les ambitions, ni le charisme! Ils ne cherchent pas à diriger les autres, mais à les dissoudre! C'est la peur qui les paralyse et c'est par défaut qu'ils sont monstrueux! Ce ne sont pas des acteurs, ni des bâtisseurs, mais des destructeurs, par leur incapacité même!

        Cependant, leur "pathologie" n'est qu'un degré ultime ou particulier du comportement général et en réalité, ils ne sont que les fruits de la lâcheté et de l'égoïsme de nos sociétés!

        Mais quels dangers présentent-ils? Nous en avons déjà quelques exemples... Un jour, des lycéens arrivent à leur école, armés, et font un massacre! On annonce encore à un pilote allemand qu'il ne sera jamais le pilote de ses rêves, parce que sa vue baisse...

        Ce coup du sort, dont la plupart s'accommoderait, est vécu par le pilote comme une injure, une humiliation inacceptable! Il décide donc de se suicider, mais nullement dans une chambre d'hôtel obscure... Il faut que jusqu'au bout il ressente sa puissance, son caractère exceptionnel! Le monde entier doit se rappeler toute sa morgue, sa supériorité!

        La suite, on la connaît... Il écrase son avion de ligne contre un versant des Pyrénées et chacun a vu ces sauveteurs, parmi les détritus, à la recherche de morceaux de corps!

        Surveillons nos monstres, comme les Américains les communistes, durant la guerre froide! Soyons prêts à donner l'alerte, car tant que nous n'aurons pas le courage d'ouvrir les yeux, ils vont nous surprendre et nous plonger dans l'affliction!

        Apprenons à les reconnaître, car ils se multiplient et nous dévorent déjà! Plus nous les verrons et plus nous serons nous-mêmes sains et lucides!

        Ils sont sans scrupules, absolument fermés et nous craignons qu'une grande nuit se prépare, car ils ne seront jamais solidaires!

  • Dans les coulisses

    Dans les coulisses

     

     

     

        Nous l'avions dit: "Trump ne sera heureux qu'avec un casque sur la tête!", eh bien, ça y est! Le voilà tel un chef de guerre, déplaçant ses troupes: 1500 hommes déployés, pour soutenir les ennemis de l'Iran et donc les amis de l'Amérique! Attention, c'est un général d'opérette que nous avons sous les yeux! Trump est né avec une cuillère d'argent dans la bouche; l'adversité, "encaisser les coups", il ne connaît pas! Il a toujours dirigé, dominé, d'où sa folie! Au moment où ça tournera mal, on peut prévoir qu'il perde pieds!

        Mais donnons un contre-exemple, pour faire contraste, pour nous ramener sur Terre! En 1917, dans les tranchées, le général Patch a un affreux mal de dents et il fait chercher un dentiste... En vain, on ne trouve qu'un vétérinaire, auquel Patch demande: "Vous avez déjà arraché des dents?

        _ Oui, à des chevaux...

        _ Eh bien allez-y, continue Patch, en ouvrant la bouche et en tendant une tenaille au vétérinaire."

        Hein! Là chapeau! Si on regarde une photo de Patch, on voit un cobra étoilé! C'est lui qui libéra la France en 44, par la Provence!

        Pourtant, Trump n'est pas l'idiot que ses plus farouches détracteurs aiment à voir! Il est bien plus complexe et sensible qu'il n'y paraît et il peut certainement même être bon! Mais, comme Bush fils, il est entouré de conseillers avides, méprisants, ne rêvant que de puissance et qui ne méritent même plus le nom de faucons, mais de hyènes!

        John R. Bolton, notamment, est un tyran avéré, c'est-à-dire qu'il ne comprend le monde que s'il le domine... Ainsi traite-t-il son angoisse, mais vous connaissez déjà cette logique! Après avoir connu un fiasco au Venezuela, Bolton "s'attaque" maintenant à l'Iran, qui d'après lui a une attitude agressive! Mais ce sont bien les Etats-Unis qui ont créé cette situation de toutes pièces! C'est bien la politique de Trump qui a poussé à bout le gouvernement iranien! Comment peut-on s'abuser au point de voir ce dernier comme le belliciste ou l'agresseur! Toutes les victimes futures, quelle que soit leur nationalité, pourront accuser Trump, lors du jugement dernier!

        Au sujet de l'Iran, nous ne saurions trop vous conseiller le livre de Armin Arefi, Dentelles et tchadors, paru en 2009, aux Editions de l'Aube... Vous y découvrirez une jeunesse iranienne sensationnelle, incroyable, dont vous tomberez fatalement amoureux! C'est comme si on atterrissait sur une autre planète, après le rideau épouvantable des clichés!

        Arefi a "récidivé" avec Un printemps à Téhéran, édité par Plon, en 2019, mais ce nouveau livre est moins bon et contient même des fautes de grammaire, ce qui laisse rêveur... Mais la magie de Dentelles et tchadors est encore là et on a quasiment envie de hurler devant la bêtise de Trump et consorts!

        Evidemment, le régime des mollahs n'est pas démocratique et peut constituer une menace, mais c'est surtout celle de la différence! Il ne faut pas en avoir peur et l'attitude de Trump montre encore combien il est faible, sans consistance; car seuls les forts acceptent l'opposition et en sont même curieux! La différence est une source de richesse, à condition de la considérer évidemment! Mais ne faisons pas d'efforts, n'ayons aucun courage et détruisons! Quel aveuglement! Trump croit encore au triomphe, qu'il sera un jour fêté comme les cosmonautes, à leur retour de la lune!

        Mais combien de morts sous les confettis? Combien d'anonymes tués dans l'indifférence? Le 15 août 1944, soixante-sept marins français, appartenant au Groupe Naval d'Assaut, aborde de nuit la pointe de l'Esquillon, dans le Sud de la France. Leur mission est du sabotage à l'intérieur des terres, pour éviter que des renforts allemands empêchent le débarquement allié. D'après leurs renseignements, la côte n'est pas minée, mais elle l'a été la veille! Les hommes sautent en nombre et meurent dans des souffrances qu'on imagine... Un peu plus tard, une jeune femme, Hélène Vagliano, est fusillée, après avoir été torturée par la Gestapo!

        A Paris, à la libération, Guitry, accusé de collaboration, réclame le droit à la légèreté et dans des salons, des hommes disent, pour excuser leur lâcheté, qu'ils n'ont pas choisi la résistance, parce que c'était mettre en danger des innocents! Certes, chacun suit sa voie et a ses opinions, mais il faut ouvrir les yeux, ne pas oublier tous ceux qui ont donné leur vie, pour que nous soyons libres aujourd'hui, ni tous ceux qu'on écrase telles de vulgaires punaises, alors qu'ils sont comme nous, avec leur histoire!

        Tant que la domination nous tient, nous sommes irresponsables! C'est l'échec, l'obstacle, le sentiment d'abandon, la peine qui déchirent la nuit, rendent humains, font comprendre, donnent de la patience, tandis que le pouvoir, les hommages, l'aisance, la facilité enchaînent dans l'enfance! Et le sage apaise, quand le tyran brûle!

        Mais baste! poursuivons... Nous sommes chez le dentiste, dans sa salle d'attente, et nous n'échappons pas à la télévision, car elle couvre tout un mur! Mais cela fait très longtemps que nous ne l'avons pas regardée et nous redécouvrons ses images, à neuf heures du matin!

         En l'occurrence, c'est un journal télévisé qui passe, sur une chaîne continue d'informations, et apparemment les choses n'ont pas changé: deux présentateurs tendus, aussi rigides que des tuteurs, étouffant presque, semblent commenter un événement extrêmement grave, au point que le studio a l'air d'un QG de guerre! Mais que se passe-t-il?

        C'est la campagne de Macron, pour les élections européennes, qui est le sujet! Son investissement est vu comme un risque politique majeur! D'autres journalistes interviennent, comme des commandants d'unités, et on ne serait pas étonné de voir dans le fond des personnages, déplaçant de petites marques, sur une immense carte!

        D'ailleurs, la gravité de la situation est encore accentuée par une "Une alerte info", en bas de l'image, et on redoute ce qu'elle annonce... Une centaine de morts dans une catastrophe ferroviaire? Macron assassiné? Les chars de Poutine à Kiev? Non, c'est un commentaire de Raffarin qui fait le texte défilant! Les cardiaques pourront porter plainte!

        A vrai dire, dans cette salle d'attente, nous sommes épouvanté par ce que nous voyons! Comment des gens, qui vivent dans une telle agitation, une telle tension, pour si peu et c'est comme ça chaque jour, comment pourraient-ils comprendre un traître mot à la vie et même aux événements qu'ils semblent maîtriser? Comment discerner où va la rivière, quand on est emporté par le courant? Son tracé n'apparaît qu'avec de la hauteur! Il est nécessaire d'essayer d'atteindre un temps qui dépasse le nôtre, par la contemplation de la beauté et donc de la nature notamment! Car nous sommes également l'objet d'une maturation, comme tout ce qui existe! Nous ne pouvons pas avoir à tout instant une réponse à nos questions! Il nous faut de la patience pour comprendre!

        D'ailleurs, quand le cerveau est trop jeune, il ne peut supporter le poids des réponses, du savoir... C'est la force de sa maturité qui lui permet de recueillir les meilleurs fruits, les plus denses! Puis, plus tard, le vieil homme abandonne la plupart de ses préoccupations, pour ne plus se préparer qu'à son crépuscule...

        Si votre temps reste uniquement celui de votre agitation, de votre tourment; celui de votre plaisir, de votre égoïsme; s'il ne s'élargit pas, mais demeure à l'échelle de l'homme, vous ne grandissez pas, vous ne mûrissez pas et votre comportement ne varie pas... Vous n'évoluez pas et vous vous débattez au milieu des événements, tel un enfant qui aurait trop de jouets!

        Le pire, c'est que quand Macron apparaît à l'écran, il est dans le même état que celui des journalistes! Il est aussi nerveux et agité qu'eux et il ne peut donc pas vraiment mieux comprendre la situation, le cours des choses et ainsi choisir la meilleure politique! Il est bon d'être engagé, mais pas au prix d'en devenir aveugle!

        Toujours est-il qu'à cet instant nous mesurons encore davantage notre isolement, car la plupart des gens vivent sans se demander où ils sont, ni où ils vont... Il existe un abîme entre eux et ce que nous écrivons, mais ce n'est pas grave... Le bonheur ou l'équilibre que nous avons trouvé ne dépend pas de l'approbation, ni de la reconnaissance générales et c'est pourquoi notre expérience a de la valeur; même si, bien entendu, il est toujours agréable de recevoir une grande claque dans le dos, en se faisant traiter de vieille canaille!

        Mais une bonne nouvelle vient éclaircir le ciel, c'est le vote Vert des Européennes! Malgré notre "clairvoyance" et comme tout le monde, nous avons été surpris par ce résultat; nous n'avions pas pris assez au sérieux les divers mouvements écologiques, qui avaient précédé les élections... Mais voilà, la jeunesse rappelle qu'elle est bien présente et sa générosité la place d'emblée au-dessus des intérêts particuliers! Cependant, ce n'est pas seulement une politique plus écologique qui pourra améliorer le sort de la planète, ainsi que le claironne le succès lugubre du RN!

        A quoi est-il dû? On a retrouvé la moustache d'Hitler! Un Russe l'avait conservée! Plus sérieusement, c'est toujours la même pente... L'angoisse, l'ennui, les inquiétudes conduisent à la domination, à la réaffirmation de son importance, au contrôle des autres; ce qui entraîne, dans le désordre, de l 'égoïsme, de la jalousie, un repli sur soi, de la fermeture, de l'intransigeance, de la dureté, du mépris, de la haine, etc. Il en est ainsi car l'équilibre de la plupart n'est construit que par la victoire, la satisfaction de l'amour-propre!

        C'est une conséquence inévitable de l'individualisation croissante des espèces et si ce comportement convient parfaitement aux animaux, pour la défense du territoire ou la sélection naturelle en particulier, il est sans issue pour l'homme, car la conscience ne peut seulement s'accommoder du triomphe du plus fort; ne serait-ce que parce nous sommes sensibles à la souffrance d'autrui!  Mais nous ne cessons de décliner ce thème, n'est-ce pas?

        Toujours est-il que la montée des nationalismes traduit nos inquiétudes, notre époque pleine d'incertitudes, et comme nous réagissons à l'instar des animaux, nous devons nous attendre à des défis, des affrontements, à des coups de dents et de griffes! Nous serons bientôt aussi secs que du bois mort! Notre air sera de plus en plus martial, ainsi que l'histoire ne nous aurait rien appris! Nous roulerons des muscles, tel Trump, à la recherche de l'injure, de l'outrage, du casus belli! Pourtant, les Européennes étaient pour nous l'occasion de penser aux Ukrainiens, aux Estoniens, aux Lithuaniens, à tous ceux qui sont petits face aux superpuissances! Mais la campagne des différents partis a été d'une grande médiocrité!

        Macron a raison, il faut une armée européenne, pour rafraîchir le front de Trump, ou pour calmer Poutine, mais vu les finances et surtout la fermeture des uns et des autres, ce vœu n'est pas prêt de se réaliser! Et la jeunesse est naturellement trop tendre, pour lutter contre l'égoïsme mûr, satisfait de sa puanteur, comme le rat dans ses excréments! Notre horizon pourrait devenir de plus en plus noir, de plus en plus sanglant, à moins que les catastrophes naturelles ne "coiffent au poteau" nos désirs guerriers! Mais tout cela échappe au plus grand nombre, car il nie son angoisse!

        Dans notre quartier, nous voyons au moins trois personnes, qui ne peuvent dormir sans la lumière allumée! Une revue féminine ne verrait là qu'un cas de claustrophobie et donnerait des conseils, comme de se frotter avec un oignon, avant de consacrer son article suivant aux tables basses! Mais l'angoisse ne touche pas seulement quelques uns, elle étend ses branches dans tous les cerveaux et si on ne la ressent pas, c'est parce qu'on prend le soleil pour un accessoire de théâtre!

        Toujours  par ici, il y a ceux qui ferment leurs volets dès huit heures du soir, tandis qu'il reste encore près de trois heures de lumière! Ils ne voient plus d'intérêt au jour et même celui-ci les ennuie et les indispose! Ils s'enferment donc, dans l'obscurité et sans doute devant la télévision!

        S'ils avaient une passion, leur activité regretterait la venue trop soudaine du soir, mais une seule chose les mène: leur domination, leur importance! Ce n'est que quand ils brillent qu'ils aiment la vie; sinon ils dépriment! A ce compte-là, ils n'ont pas la solution de leur problème, parce que la plupart des autres sont comme eux! Si chacun tire la couverture à soi, chacun finit par avoir froid!

        Comment alors ne pas comprendre que dans ces "terriers" naissent le ressentiment, l'incompréhension, la crainte; toutes les conditions favorables à un vote RN?

        Pour un monde meilleur, il est nécessaire de "casser" ce réflexe, qui nous fait croire que notre bonheur ou notre réussite résident dans notre supériorité! Que l'on regarde autour de soi! Qu'on redevienne enfant, pour la curiosité, l'émerveillement, la douceur, la confiance tranquille; celle qui fait chanter sa joie et contempler les nuages comme une caresse!

  • Dans la bauge

    Dans la bauge

     

     

     

     

        Comme chaque jour, nous nous heurtons au tyran. Nous sommes à faire nos courses, à un étal ou à la boulangerie, et le voilà qui arrive, aussi précis qu'un train, aussi rapide qu'une mouche! Aussitôt, il pèse et l'image la meilleure qui pourrait le représenter est celle-ci... Einstein découvre que la gravitation, bien qu'elle obéisse aux lois de Newton, est en fait un champ gravitationnel, car la masse des astres déforme l'espace... La lumière elle-même est déviée et le tyran a une action similaire: il veut être le centre du monde, grâce à la tension qui l'habite!

        Nous voudrions nous tourner vers lui, pour lui dire: "Si je comprends bien, dès que vous êtes là, il faut que les autres dégagent, c'est ça?" Le tyran montrerait d'abord de la surprise, de l'incompréhension, comme si nous étions nous-même l'impoli ou fou! Il faudrait alors lui expliquer que personne ne met de la mauvaise volonté, que c'est à chacun son tour et qu'il ne doit pas faire pression sur les autres, qu'il n'a pas à les serrer comme ça! (Qu'il se détende, bon sang!)

        Face à ce discours, le tyran ne conviendrait de rien; il pourrait même se récrier et s'excuser, comme s'il s'agissait d'un malentendu; mais, dans le fond de son cœur, il vous haïrait, son orgueil étant piqué! Il reculerait néanmoins et vous laisserait plus d'espace, mais une telle explication vous aurait épuisé et vous ne la recommenceriez pas de sitôt!

        Aussi l'attitude la plus courante face au tyran est-elle une résistance silencieuse, secrète pourrait-on dire! Sous la menace, on se relâche encore plus, on respire plus profondément, on se défend en devenant plus calme, plus dense; on prend son temps... Non par bravade, pour envenimer les choses, mais par respect pour soi, pour refuser l'égoïsme et la bêtise! Car ce n'est que cela: il n'y a pas de gens pressés, il n'y a que des bébés attardés, qui ne savent pas se contrôler!

        Cependant, même si on résiste au tyran, il nous oblige à réagir et c'est encore une usure; alors qu'un autre monde est imaginable, où chacun respecterait l'autre! Mais, comme on ne cède pas au tyran, celui-ci enrage et peut faire valoir sa haine davantage! Il se campe par exemple près de nous, son air de dégoût nous analysant de la tête aux pieds! Il peut encore nous coller encore plus, de sorte qu'il nous semble, quand on se retourne, telle une matière molle, dont on aurait de la peine à se débarrasser... Il est possible enfin qu'il nous donne carrément un coup de coude au passage, qui serait mis, si on le relevait, sur le compte de l'étroitesse des lieux ou de la distraction... Mais c'est pourtant une véritable petite agression, qui laisse entrevoir au bord de quels abîmes nous vivons!

        Mais nous croyons qu'il ne faut surtout pas croiser les yeux du tyran, le considérer, car la pire insulte pour lui, c'est l'indifférence! Non seulement celle-ci le blesse au plus profond, mais elle lui montre aussi le visage encore lointain de l'angoisse! En effet, le tyran ne voit qu'un monde, le sien, celui qu'il domine! Les autres n'y ont pas une existence vraiment réelle... ou plutôt ils ne sont pas les égaux du tyran, ils n'ont pas les mêmes droits que lui! Mais ils doivent lui obéir et reconnaître sa supériorité (ce qui est une plaisanterie, bien entendu...)! Tout élément qui résiste est une étrangeté, un univers inconnu, une réalité soudain détestable pour le tyran, dont nous allons essayer de comprendre encore mieux le phénomène!

        Les scientifiques, pour expliquer le génie, le pouvoir créatif, émettent l'hypothèse d'une sorte d'autisme... et on comprend leur point de vue. Comme a priori nous naissons tous avec le même cerveau, il faut bien que l'idée originale, créatrice, vienne de quelque part et peut-être qu'elle est le fruit d'une maladie mentale, d'autant que le créateur semble en proie à une véritable obsession, ne serait-ce que parce qu'il doit lutter contre vents et marées!

        Ce qui fait avancer l'humanité serait ainsi un accident, une anomalie, voire un parasite, comme le champignon sur une souche, ou la rouille sur une barre de fer! Mais nous laissons à la science la responsabilité de cette voie, qui peut se révéler extrêmement périlleuse, puisqu'il faudra tôt ou tard regarder Darwin ou Freud tels des malades!

        Ceci étant, nous pouvons mieux parler des véritables artistes, qui sont plutôt de grands névrosés, et ce qui les caractérise le plus souvent sur le plan psychologique, c'est le doute, l'effacement devant le jugement des autres, la dépression, qui peut aller jusqu'au plus profond dégoût de soi-même! Nous n'expliquerons pas ici la raison de ce comportement, bien que l'analyse freudienne soit fausse, mais même si l'artiste croit en son talent, surtout s'il crée, il est très difficile pour lui de ne pas être à nouveau victime du découragement, de l'abattement, ce qui le mène à mépriser son œuvre et à souhaiter un autre travail, une autre tâche, qui lui permettrait de se sentir plus utile, plus aimable...

        Il suffit de voir les atermoiements d'un Pissarro, les excuses d'un Baudelaire ou les souffrances d'un Van Gogh, pour s'en convaincre... Cézanne, dans son désespoir, croyait que le génie c'était son père, puisque celui-ci, grâce à sa fortune, lui assurait une rente... Mais, bref, il n'est pas rare que l'artiste finisse par regretter son exception et par envier la "normalité" des autres, et si nous avons pris le temps de dresser un peu de son portrait, c'est qu'il ne correspond pas à celui de l'autiste!

        En effet, d'après nos propres observations, un élément essentiel qui caractérise l'autiste, c'est sa fermeture, sa psychorigidité... Tout le monde connaît certains dons exceptionnels des autistes: ils peuvent notamment être très précis, avoir une mémoire extraordinaire et relever des erreurs que personne ne voit! Mais c'est justement cette capacité qui constitue un handicap, car le monde de l'autiste repose sur des détails, sur une logique, ainsi que son cerveau serait tel un mécanisme d'horlogerie!

        Si on fait obstacle à l'autiste, on a droit à sa colère ou à sa panique, et c'est pourquoi on parle de maladie, car les limites sont vite atteintes! Il n'y a pas chez l'autiste un véritable échange social, qui demande nécessairement une souplesse d'esprit, une capacité d'adaptation... On doit pouvoir reconnaître la supériorité de l'autre ou au contraire ne pas lui montrer son infériorité! Rien que les faits ou la stricte exactitude excluent toute relation! En tout cas, nous sommes très loin ici de l'artiste qui, à force d'échecs, est tout prêt à se désavouer et à suivre l'avis de ceux qui le critiquent, ce qu'il regrettera d'ailleurs  amèrement plus tard!

        Mais, si l'artiste n'échappe pas à la catégorie des "roseaux pensants", chère à Pascal, par contre on peut se demander très sérieusement si le tyran, lui, n'est pas beaucoup plus près du comportement de l'autiste; car comment regarder différemment sa façon de traiter les autres? Il ne les respecte pas lui-même! Il est également fermé, dur et sujet à la colère et à la haine, s'il est contrarié! Quand on sait qu'il forme la majorité, cela laisse rêveur! Certes, il est sociable et il est même vu par la science comme un modèle de bonne santé, car ce sont ses projets, ses ambitions, son égoïsme, qui a priori animent la société et la développent; et pourtant chaque jour il blesse autrui et empêche le bonheur... Mais si la science ignore le "phénomène du tyran", c'est parce qu'elle ne le voit pas, tout simplement! Tâchons donc d'aller encore plus avant, afin d'examiner celui-ci en plein soleil!

        En ce qui nous concerne, nous fréquentons un bouquiniste, avec lequel nous aimons évoquer les guerres passées, les déclarations des uns, les erreurs des autres... Cela est plein d'enseignements et Vichy, en particulier, est un sujet qui redonne toujours le moral! Mais, durant la discussion, il est naturel que d'autres clients passent et nous voyons la haine de leur regard, quand ils découvrent qu'ils ne seront pas seuls avec le bouquiniste! Cette réaction ne nous surprend pas, bien au contraire, puisque nous l'avions nous-même, à une autre époque, il y a longtemps!

        Mais d'où vient-elle? Nous sommes tous à l'origine impatients de nous sentir vivre, de montrer notre talent, notre richesse, notre importance, et cela est si fort que le moindre empêchement, que tout ce qui nous retarde, nous ralentit, cause notre énervement, notre dégoût, notre colère, notre irritation! C'est l'enfant qui est en nous qui continue de souffrir, dès qu'il n'est pas immédiatement satisfait!

        En constatant ce processus et ses conséquences, la haine pour autrui et la douleur pour soi, nous avons décidé d'évoluer; nous avons appris à être patient, pour ne pas dire confiant; nous avons grandi, atteint une certaine maturité, qui nous permet de ne prendre nul ombrage, quand bien même nous n'aurions pas l'occasion de nous faire valoir! Au contraire, ce détachement, cette maîtrise nous donne liberté et légèreté! Nous ne souffrons presque plus et même nous sommes si fort, si disponible,  qu'il nous arrive d'avoir de la compassion pour tous ceux qui se débattent encore avec leur amour-propre!

        Mais une conclusion s'impose: le tyran, au fond, n'est rien d'autre qu'un enfant dans un corps d'adulte! Il refuse toute maturation, parce qu'il a l'impression que s'il faisait des efforts, s'il consentait à se diminuer, à reconnaître son ignorance, ce qui est nécessaire pour apprendre, il serait perdant, il n'aurait pas sa place; sa jouissance serait moindre! Il reste donc avec son avidité et sa fragilité d'enfant et son destin est souvent malheureux, voire tragique!

        Par exemple, un patron de bar expatrié, en France, un Irlandais, se calme en s'emportant régulièrement contre sa femme! Quand celle-ci ne peut plus supporter la situation et demande le divorce, notre homme ressent soudain une telle solitude qu'il décède d'une attaque cérébrale! Rappelons que le tyran n'a pas d'autre équilibre que celui de l'enfant despotique! Autrement dit, s'il n'a plus de victimes, il est perdu!      

        Autre exemple... Un charcutier, tout en se plaignant tout le temps de son travail, se montre dur et intransigeant à l'égard des autres, mais il doit aussi prendre sa retraite et vendre sa charcuterie... Il meurt quelque temps après, d'un cancer foudroyant, car la peur n'avait plus aucun obstacle devant elle! Si le métier s'arrête, le vide apparaît, au point que le premier peut rendre esclave! Mais ceci révèle encore combien le sort du tyran est peu enviable, car il est dépourvu de paix!

        Elargissons notre point de vue et considérons le conflit israélo-palestinien! S'il n'était pas lugubre et cruel, il ressemblerait à un match de tennis, entre Borg et Connors!  Cela paraît sans fin, inextricable, et gagné par le découragement, on a envie de dire quelquefois: "Mais qu'on les laisse s'entretuer! Comme ça, ils seront moins et on sera plus tranquille!"

        Pourtant, il n'en a pas toujours été ainsi... Les "pères fondateurs" de l'état d'Israël ont été plutôt de gauche, des travaillistes, et qu'ils s'appelassent Ben Gourion ou Mosche Dayan, ils n'ont jamais oublié qu'il faudrait traiter avec les Palestiniens! Ce sont les leaders de droite, du parti du Likoud, qui n'offrent qu'un dialogue de sourds, et parmi eux on citera Begin et Shamir, qui étaient tous deux des terroristes, du temps du protectorat britannique; c'est-à-dire qu'ils ont tué ou fait tuer au nom de leurs convictions. Shamir d'ailleurs a vraiment été le Mesrine des Anglais et la France a pu l'aider à leur échapper, car à cette époque notre pays avait à cœur d'empoisonner la situation! Mais ceci est une autre histoire...

        Toujours est-il que la droite conservatrice est bien plus proche de l'attitude "autiste" du tyran! Elle refuse de prendre en compte l'existence de l'autre, ou de la différence, et elle vit dans l'illusion qu'elle finira par triompher, que ses ennemis disparaîtront! Evidemment, les partis extrémistes sont encore plus engagés dans cette voie et c'est pourquoi ils ont toujours veillé à ruiner les négociations pour la paix! Du côté palestinien, ce sont les attentats-suicides du Hamas et les fanatiques religieux juifs sont à l'origine de massacres... En 1995, le premier ministre israélien, Rabin, est même assassiné par un de ses compatriotes, parce qu'il était favorable aux accords d'Oslo, certainement la tentative la plus sérieuse pour aboutir à la paix!

        Aujourd'hui, Netanyahou symbolise la droite gâtée et capricieuse, car les menaces pesant sur Israël sont de moins en moins lourdes; mais son sourire fait plutôt penser à celui d'un homme assis sur une caisse de dynamite!

        De même, un ancien conseiller de Trump est venu en France, apporter son soutien à la liste européenne de Marine le Pen, parce que dit-il: "Il faut que les nationalismes s'internationalisent!" et effectivement, on a vu les présidents de la Hongrie ou du Brésil, pour ne citer qu'eux, se rendre aux Etats-Unis, pour saluer leur quasi cornac Trump!  

        Mais le but final d'un nationalisme, malgré les belles formules, c'est sa domination, sa supériorité sur les autres, ce qui mène au conflit et à la guerre! Ainsi, L'Iran essaie-t-elle déjà de répliquer à la politique écrasante et méprisante du président américain... Des missiles partent du Yemen, en direction de l'Arabie saoudite!

        En fait, le tyran, qu'il soit un homme de la rue ou aux commandes d'un pays, met à bouillir l'humanité; c'est la fascination ou l'aveuglement de l'enfant, quand il brûle des criquets ou démembre sa poupée! Et nous n'avons donc pas fini de voir le faible se tordre de douleur!

        PS: nous vous conseillons vivement les dernières photos de cette semaine, car ce sont de remarquables clichés d'épaves!

  • Du remède

    Du remede

     

     

     

        Reparlons de l'angoisse! Car c'est un sujet passionnant et auquel nous sommes confrontés chaque jour! Il nous est donc essentiel et il est vrai qu'on ne peut jouir de la vie, tant qu'on est la proie de l'angoisse! Cherchons donc son remède, examinons lequel d'entre eux est le meilleur; dénonçons les faux médecins, les savoirs impuissants; afin que nous puissions nous aussi, tel Jésus, marcher sur les flots de l'angoisse qui noient le monde!

        Mais d'abord rappelons ce qu'est l'angoisse et sa cause... Le mot vient du latin angustus, qui veut dire étroit! Nous avons déjà écrit cela ailleurs, mais on n'en finit pas d'"apprendre la vie"! Cependant, à chaque fois que nous sentons notre développement limité, inexistant, comme si nous étions prisonniers, nous éprouvons une impression d'étouffement, de malaise et très vite notre nervosité apparaît! Nos gestes deviennent mal assurés, distraits, car notre cerveau est préoccupé et c'est à ce moment que se produit l'incident, comme d'oublier son portefeuille sur la table du restaurant!

        Nous sommes perdus, dès que nous n'avons plus le sentiment de notre valeur! Nous voilà comme un poisson hors de l'eau: nous cherchons désespérément de l'oxygène, du plaisir en fin de compte! Dans certains cas, quand le psychisme est déjà affaibli, l'espace autour peut paraître si écrasant qu'il déclenche une panique! Mais la plupart du temps, ce n'est qu'une gêne; "comme si l'angoisse voulait juste nous aider à aller encore plus mal"! Notre existence ainsi nous est à charge; elle est pleine de nuages noirs; et quelle différence avec nos moments heureux! Nous ne comprenons pas; le froid est venu subitement...

        C'est que la situation de l'homme ne pose aucun problème, du moment que nous sommes à nos projets, à nos joies, à nos espérances! Le bonheur ou la réussite nous donnent comme un habit de cosmonaute: nous ne subissons pas l'hostilité de notre monde! Et pourtant les abîmes nous entourent! L'inconnu peut se dresser tel un dieu de glace, à l'infini! Il peut nous renverser d'un souffle! La différence, la contrainte, l'échec nous rendent peu à peu et plus ou moins perméables au trouble, à la peur! Notre gaine protectrice n'est pas immuable; bien au contraire, elle n'est jamais vraiment étanche!

        Pour échapper à nos inquiétudes, nous cherchons naturellement à nous sentir de nouveau importants, utiles! Nous voulons de la force, que notre tâche avance, pour effacer le brouillard qui nous environne!  La lumière, c'est le progrès, avons-nous envie de dire et comme c'est notre place qui se joue, la formule du remède pourrait être: "Vous êtes tip top, extra, sur la bonne voie; on ne peut pas faire mieux; cool, la classe, quoi!" "Les obstacles? Hop, ils sont derrière moi, dans la poudreuse!" "J'suis Killer crocodile! Mes mâchoires ne se ferment jamais sur du vide! Mon parfum? Nez de buffle!" "Non, mais j'suis à tomber! J'suis la bombe! Mes lignes rendraient jalouse une antilope! Ah! les pauvres mecs! Y bavent! Y savent faire que ça!" Oui, avec un tel remède, la mort et toute la bêtise de l'espace, la lèpre et les chaussures trop chères n'existeraient plus! Ce serait du printemps concentré... ou comme la potion d'Astérix! Mais est-ce vraiment possible? Peut-être!

        Mais, on le voit, notre premier réflexe face à l'angoisse, c'est la domination! Issue du règne animal, c'est elle qui renforce d'abord le sentiment de notre pouvoir, de notre supériorité! Exemple: Trump!

        Il est partout sur la scène internationale et même dans son propre pays! Il passe de l'avortement, à son mur; de la Corée du Nord à l'Iran, etc.! Il régit tout, condamne tout,  encense qui il veut et bref il est omniprésent! A priori, c'est la bonne formule: l'économie des Etats-Unis n'a jamais été aussi florissante, pour reprendre une expression de son président; le taux de chômage est aussi bas que celui de l'année 69! L'Amérique se voit de nouveau forte; elle espère de nouveau, dans le sillage tumultueux de Trump; mais c'est l'égoïsme qui triomphe et ce ne sera qu'une victoire temporaire, qui mènera même à la catastrophe et à beaucoup de larmes!

        Car vous ne pouvez pas vous imposer aux autres sans les blesser, sans les écraser, et donc sans susciter de la haine, de la vengeance, de la violence! L'un de ces premiers effets est la condamnation à mort en Iran de deux mineurs violeurs... Cela peut être une coïncidence, mais comment ne pas voir là une réaffirmation du régime qu'il sera intraitable, qu'il est dans son droit, qu'il est légitime, malgré les pressions de Trump (à l'heure où nous écrivons ces lignes, l'Iran vient de poser un ultimatum à l'Europe!)! Deux mineurs ont déjà fait les frais de la politique expansionniste américaine! Qui aura pensé à ces deux là? Leur famille ont sûrement de la peine et leur ressentiment vient s'ajouter à combien d'autres? La spirale de la souffrance et du mal n'a pas de limites, et tôt ou tard elle se retournera contre Trump!

         La domination pour lutter contre l'angoisse est le pire remède qui soit! Outre qu'il fatigue, car il faut incessamment des projets, du mouvement, il ne résout au fond rien: il faut tout le temps dominer, encore et encore, pour échapper à l'angoisse, qui de toute façon revient! Combien de victimes ne laisse-t-on pas derrière soi! Mais est-ce à dire que plus l'angoisse est forte et plus la domination l'est également, ou encore, à l'inverse, plus l'orgueil est fort et plus la peur l'est aussi? Sans doute, mais ce n'est pas un processus fatal; l'intelligence est justement là pour comprendre et nous changer!

        Cependant, l'angoisse crée aussi le rejet, le mépris! C'est très simple, car cela découle de ce qui vient d'être dit... En effet, ce qui menace une domination est forcément un facteur d'angoisse et quand on ne peut pas dominer cette menace elle-même ou la détruire, on lui oppose son mépris, comme si elle n'existait pas, n'avait pas de sens! On se protège donc par le mépris, on garde sa "réalité", son monde; on se convainc que ce qu'on a aperçu n'était qu'un mauvais rêve, une ineptie, un fantasme!

        Pourtant, on devrait savoir que dès lors on a une vie artificielle et que l'angoisse qui est tenue dehors ne cessera de grandir! On évite la vérité ou l'élément étranger par faiblesse, parce qu'ils sont déjà épouvantables, et le mépris est un aveu d'impuissance! Ainsi, le slogan: "Macron dégage!", malgré toute sa violence, est une forme de mépris! Il nie tout le processus électoral, car s'il fallait vraiment le considérer, cela exigerait de la retenue, de la patience, de l'attention; ce qui permettrait à l'angoisse de réapparaître telle qu'elle est! On préfère donc croire à un "coup de baguette magique", comme le bébé crie plus fort, pour qu'on vienne le voir, et dans ces conditions bien entendu, le dialogue est au fond impossible!

        Mais la domination peut encore être tournée contre soi-même et l'angoisse devient alors un maître exigeant, tyrannique, voire tortionnaire! On devient son propre esclave, on travaille au-dessus de ses forces et on finit par se blesser. Cela peut être de la dépression: on s'affaisse et on éclate en sanglots! On a des idées de suicide... Mais on peut aussi s'énerver, vouloir faire à tout prix le ménage et empoigner quelque chose de trop lourd, qui finalement nous tombe sur le pied, pour nous conduire à l'hôpital;  où on rigole avec celui qui s'est brûlé au-dessus de son barbecue, ou avec celle qui s'est donné un coup de sécateur! Une sciatique carabinée nous montre encore tel un vieillard et nous apprend patiemment à prendre le temps!

        Nous sommes prêts également à nous priver de notre liberté, pour ne plus souffrir de l'angoisse... Certains, pour ne pas dire la plupart, fondent une famille dans ce sens et deviennent bientôt malhonnêtes, à se plaindre de la lourdeur de leur charge, car les enfants ne sont pas seulement une source de devoirs, ils offrent aussi l'occasion aux parents d'être dominateurs et donc d'avoir de l'importance, ce qui chasse l'angoisse!

        Par ailleurs, le sport est ordinairement un bon calmant (c'est encore une domination sur soi...), mais ses excès sont parfois mortels! Il y a peu un champion de snowboard, en voulant battre un record, a été hospitalisé dans un état grave et le clown Artemus Gordon est décédé en jouant au tennis! Le raid, l'exploit, l'aventure permettent d'explorer ses limites et seuls ceux qui ont survécu dans des conditions extrêmes sont riches de cette connaissance!

        C'est parfois un peu loufoque et trop risqué... Dernièrement, un aveugle a traversé le Pacifique à bord d'un voilier... et ça c'est plutôt bien passé... En fait, c'est pour partir du port que tout le monde a pris une suée! Mais même la paix qui découle du dépassement de soi est éphémère; l'exploit finit par ne plus nourrir et la confiance disparaît! Ainsi, Mike Horn, dans sa nouvelle carrière à la télévision, se révèle dominateur et méprisant; car, malgré tous ses périples, l'obstacle de son angoisse demeure!

        Autre exemple, Gérard d'Aboville qui commence son livre "Seul" par une blessure, une humiliation... Un quidam lui dit qu'il n'a pas vaincu avec ses rames le plus grand océan du monde, puisqu'à quelques kilomètres de l'arrivée il a préféré monter à bord du bateau venu l'assister! Bien que ce choix fût certainement le plus raisonnable, car une tempête sévissait sur la côte, et qu'il dût être éprouvé comme un crève-cœur, d'Aboville convient que les faits sont là et on voit alors comment la dépression fait son œuvre!

        Car, imaginez-vous dans un caisson étanche, à l'écoute des vagues les plus monstrueuses, qui arrivent comme des trains! Plus elles vous soulèvent et plus durement elles vous font retomber, vous écrasant dans un fracas d'eau! Vous pensez à chaque fois que c'est la fin, mais le "toboggan de la mort" recommence! Comment pourriez-vous ne pas juger par la suite la plupart des préoccupations terriennes comme anodines?

        Mais il faut toujours de l'action, pour repousser l'angoisse, et l'agitation constante et quasi frénétique de nos sociétés ne s'explique pas autrement! Ainsi naissent l'agressivité et les incivilités!

        Vouloir aller vite est un symptôme d'angoisse! Quand le gouvernement montre son désir d'obtenir rapidement des résultats, il laisse voir son futur échec! Car l'angoisse ne permet pas de bien comprendre les choses et la greffe de la politique de Macron ne prendra pas!

        Par ailleurs et n'en déplaise à la psychologie, mais la soif de sexe est aussi produite par l'angoisse! Mais baste, arrivons à la religion, qui nous préoccupe beaucoup, depuis qu'elle vient nous tuer dans nos contrées laïques! Est-elle un bon remède contre l'angoisse?

        Dans la plupart des pays musulmans, la religion est le cadre, la loi, le sens! Allah y est vu comme une autorité suprême, à travers un fonctionnement rigide, notamment on doit prier cinq fois dans la journée, à des heures précises; sinon on n'est pas un bon musulman et on encourt tôt ou tard des sanctions! Mais on comprend facilement que, dans ces conditions qui restent somme toute scolaires, l'angoisse ne puisse franchir le portail de la religion et que, si elle insiste, elle ait affaire au directeur!

        Cependant, un tel fonctionnement empêche l'individualisation, c'est-à-dire le développement des pays, et c'est pourquoi le monde musulman paraît s'éveiller aujourd'hui d'un long endormissement (la domination coloniale est une autre raison...)! C'est même un réveil extrêmement brutal, car la technologie et le confort de l'Occident n'ont jamais cessé de "cavaler", grâce à la liberté de la science, elle-même due à la laïcité!

        Cela explique encore pourquoi la démocratie, le pouvoir accordé aux individus, que propose volontiers  et principalement l'armée américaine est incompréhensible aux populations de pays détruits, comme l'Afghanistan ou l'Irak; même si elles sont débarrassées de leurs tyrans! L'individualisation est si soudaine qu'elle devient synonyme d'angoisse et la seule bouée de sauvetage reste encore l'ancien mode de vie, l'islam!

        En fait, tant qu'elle est un pouvoir, la religion ne peut que conduire ses responsables à la domination, s'ils se sentent menacés! Ainsi, Dieu ou Allah apparaît comme un égoïste, un violent ou un assassin, et c'est bien l'islam qui dessert le plus l'islam, bien au-delà de toute caricature!

        Cependant, de tout ce qui vient d'être dit, on peut conclure que la religion n'offre pas le bon remède, mais que reste-t-il alors? Mais la solution, nous l'avons sous les yeux! C'est la connaissance, le savoir! Imaginez-vous lisant sans difficultés tous les comportements que vous avez devant vous! Comment pourriez-vous vous sentir seuls et angoissés? Encore faut-il distinguer le savoir scientifique de celui de la sagesse!

        La science, parce qu'elle croit que c'est nécessaire à son objectivité, regarde l'homme comme un étranger et elle ne peut pas entièrement le comprendre... A votre avis, pourquoi Freud a-t-il essayé de tout expliquer, l'alpha et l'oméga, par la seule psychanalyse, sinon pour lutter lui-même contre l'angoisse! Le savoir peut devenir aussi dominateur et aujourd'hui, la psychanalyse est une vaste cathédrale, avec ses prêtres qui, à l'occasion, se montrent aussi agressifs et hostiles que ceux de la religion! Mais il y a pire, car au fond le seul bien que la psychologie apporte à ses patients, c'est la restauration de leur égoïsme, ce que nous voulons justement éviter!

        La sagesse, elle, voit d'emblée l'homme comme l'aboutissement de l'individualisation que connaît la vie et ainsi la conscience prend tout son sens! Le sage trouve sa place au-delà de toutes ses espérances et marche sur la voie de l'Illumination, qui n'est rien d'autre qu'une foi sans peur!

       

  • Sur le vide...

    Sur le vide

     

     

     

        La révolte des gilets jaunes se termine et elle est de plus en plus violente, car le "fond de la bouteille" est constitué d'extrémistes, de ceux qui se donnent une existence par l'affrontement même! C'est leur égoïsme qu'ils brandissent! C'est leur amour-propre qui défie! Depuis longtemps déjà, les idées ont déserté leurs rangs...

        Les autres sont rentrés chez eux, tâchant de faire différemment, s'efforçant de dépasser leur amertume, essayant de grossir leur budget par des moyens nouveaux; se souvenant sans doute de moments particuliers; se demandant peut-être s'ils ont eu raison d'arrêter... Le quotidien reprend ses droits et les laisse désorientés...

        Mais au fond pouvait-il en être autrement? Ont-ils jamais su ce qu'ils voulaient vraiment? Leur colère, leur angoisse étaient bien réelles, mais le gouvernement n'avait pas le remède pour les apaiser, car leur mal-être n'était pas lié aux taxes, ni à leur liberté; même si certaines mesures gouvernementales sont à rejeter!

        En fait, la révolte des gilets jaunes a remis au goût du jour une question essentielle: pourquoi vivre? En effet, le "vide" de nos sociétés n'apparaît pas tant qu'on a de l'argent et les ambitions qu'il génère! C'est quand on ne peut pas rêver de consommer et d'obtenir du pouvoir que la vie semble absurde et angoissante! C'est le vide du porte-monnaie qui montre le vide qu'il y a autour!  Notre époque n'a plus de sens à proposer..., bien que Macron ait l'air de dire le contraire, et c'est pourquoi il est rangé du côté des nantis et haï pour cela!

        Nos sociétés sont comme des campagnes désertes, sauf pour le train de l'argent et du pouvoir! C'est bien cela le problème et croire qu'il faille revenir aux anciens modèles de la Commune et de l'Assemblée constituante, c'est se tromper soi-même! C'est d'abord édulcorer le passé, le peindre aux couleurs de l'arc-en-ciel, comme le font les islamistes au sujet de la communauté du Prophète!

        Ensuite, c'est ignorer l'histoire, la mépriser, car nous passons de la Commune à la Troisième république, parce que la première est invivable, et la Cinquième république, avec un président fort, finit par s'imposer, car l'expérience nous a montré qu'il faut un responsable qui peut décider!

        Notre "système" ne peut guère être meilleur et ce n'est pas en le détruisant que nous nous épanouirons! Nous ne sommes pas en Egypte, où les injustices sont toujours flagrantes, démesurées; où l'oppression reste meurtrière! Le mouvement des gilets jaunes n'a pas renversé le gouvernement, parce qu'il n'a pas la légitimité du Printemps arabe! Macron n'est pas Moubarak et on ne peut pas non plus faire disparaître toutes les inégalités!

        Par contre, oui, la pauvreté de nos sociétés, sa misère spirituelle est à regarder au fond des yeux! Chacun désormais, en cherchant à comprendre les événements, peut être conduit à se demander effectivement: pourquoi vivre? Ce qui revient aussi à essayer de diminuer son angoisse, même si ceux qui ont un beau compte en banque et de la réussite continuent leur "numéro", comme si de rien n'était!

        Car, en réalité, la violence des gilets jaunes ne peut pas s'expliquer autrement que par le vide qui l'attend, si elle cesse! Il faut à tout prix voir Macron en despote et croire à un tas d'autres fariboles, comme celle d'un complot des riches pour exploiter les pauvres! Il faut garder la vision d'un monde manichéen et l'image d'un méchant! C'est l'angoisse même qui commande l'illusion! La peur provoque le rejet! Que retrouvera-t-on chez soi si on rentre? La solitude et le désespoir! Pour éviter cela, on s'invente un ennemi, qui est la cause du malheur et de la tristesse!

        Cette façon de faire n'est pas propre aux gilets jaunes et aux revenus les plus modestes; elle est a priori en chacun de nous! Que l'on menace de plus riches, qui ont un métier, du pouvoir, de la reconnaissance; qui ont une famille pleine d'avenir et dont l'image est celle de la réussite; que l'on parvienne à les inquiéter, en leur montrant subitement une réalité dont il ne se doute même pas; qu'on brise ainsi leur rêve, comme si on ouvrait "une trappe dans l'avion"; et on les verra changer à vue d'œil! Leur métamorphose sera spectaculaire: ces gens, qui apparaissaient comme des modèles d'équilibre, seront soudain froids, méprisants, étrangers, durs comme de la pierre! Ils n'auront plus rien de civilisé, car ils obéissent à un mécanisme de défense, qui révèle toutefois toute leur faiblesse, leur mirage et leurs mensonges!

        Ils pourraient apprendre, contredire, se renseigner, discuter; mais la peur et l'égoïsme les en empêchent! Seul celui qui est fort, parce qu'il a bâti avec la vérité, seul celui-là peut être curieux de la différence et ignorer la critique! Pour les autres, il faut des ménagements, des contes, car au vrai il n'y a pas de fondations! Et notre société, et notre monde continuent parce qu'ils se racontent des histoires! Le pouvoir et la consommation sont les fées de notre temps! Malheur à celui qui raconte qu'elles n'existent pas! Et il ne faut donc pas s'étonner de la violence, ni des phantasmes des gilets jaunes, car eux, par contre, n'ont plus les moyens de rêver, de s'illusionner! Les factures ont fini par les "réveiller" et c'est pourquoi ils se sont empressés de se placer dans une autre épopée, une autre "geste"! Mais la question reste: "Pourquoi vivre?" et il n'est pas facile d'y répondre!

        Parce qu'il faut vivre tout simplement? Cette réponse n'est pas valable, car nous ne pouvons vivre seulement par devoir; il nous faut du plaisir!

        Alors, noyons-nous dans les plaisirs! Ce n'est pas plus praticable, c'est la voie royale vers l'hôpital et la mort!

        L'une des grandes calembredaines de la science est celle-ci: "Soyons les pionniers du progrès! Réjouissons-nous de laisser notre pierre, car un jour l'humanité, grâce à la science, pourra contrôler, assurer son bonheur!" Ce "slogan" permettrait d'accepter la mort, nous faisant "passeurs d'eau", et il est surtout présent chez les psychologues, qui rêvent d'une connaissance du cerveau ou de l'esprit, jusqu'à ce que nous jouions avec les planètes au bilboquet; simple distraction de notre télékinésie!

        Mais des psychologues parlant de l'importance de leurs théories, c'est comme si des diplodocus nous enseignaient comment lutter contre le surpoids! Derrière la science, il y a encore beaucoup d'égoïsme et de domination, et c'est cela qui la fait "tenir debout"! La science, c'est le royaume des aveugles, avec un phare devant, pour montrer qu'il y a de la lumière!

        Pourquoi vivre? Reprenons, si vous le voulez bien (livre 1, verset 4...)... Nous savons que l'Evolution est fondamentalement une individualisation, puisque plus les organismes sont complexes et plus ils sont individualisés! Nous avons encore compris que l'individualisation se poursuit par la domination (il ne peut en être autrement) et il est donc normal que nous voulions dans un premier temps devenir plus grands, plus forts, meilleurs! Ceci donne nos sociétés, qui permettent le développement personnel, avec l'envie de réussir et de gagner de l'argent!

        Mais cela ne suffit pas! La peur et l'angoisse nous suivent pas à pas! C'est l'inconnu, découvert par notre conscience, qui nous talonne! Tant que nous réussissons et que nous pouvons nous consoler avec la consommation, nous pouvons pérorer à loisir et nous ne nous gênons pas! D'autre part, notre fonctionnement est établi de sorte qu'il sert de garde-fou! La société n'est ni plus ni moins qu'une salle de classe pour adultes! La peur prend la figure du proviseur, et de temps en temps on entend le glas et on croise un cortège funèbre, comme on regarde les voisins déménager! C'est une petite attraction!

        La domination, produite par l'individualisation et qui nous écarte de notre peur, nous fait vivre sur un tapis volant, dont la formule magique est le pouvoir et l'argent! Voici encore pourquoi nos sociétés sont si difficiles à réformer, car dès qu'on voit son pouvoir ou son argent diminuer, le tapis volant plonge dans l'abîme! Nous sommes comme dans une impasse!

        Nous pouvons choisir, comme Trump, de renforcer la domination, d'augmenter le pouvoir et l'argent, et apparemment c'est la solution: le tapis volant est tout en haut dans le ciel! La peur est minuscule en bas! Mais la tyrannie qu'on a engendrée vient frapper comme la foudre! C'est la tempête des opprimés, de tous ceux qui ne peuvent échapper à la peur! C'est le fanatisme! Ce sont des gilets jaunes qui ont des canons, des couteaux, une formidable haine surtout! Qu'importe! On les écrasera tous, n'est-ce pas monsieur Trump! Il ne sera pas dit qu'on discutera tant qu'il y aura du terrorisme, etc.!

        Le problème de la domination, alors qu'elle nous est si naturelle, c'est qu'elle ne résout pas vraiment notre angoisse et qu'elle n'est qu'une fuite en avant, qui ne peut mener qu'au despotisme! Nous ne pouvons vivre tels les animaux! Mais tout cela nous l'avons déjà dit maintes fois. et nous nous sentons tel un vieillard qui radote...

        Cependant, nous n'avons pas pris l'exemple de l'Egypte précédemment par hasard... Ce qui s'est passé sur la place Tharir est exceptionnel! La jeunesse égyptienne a chassé deux présidents: Moubarak et Morsi! Outre qu'elle est devenue autonome, elle a aussi placé la religion musulmane dans une situation inédite, vertigineuse!

        En effet, le monde musulman est resté traditionnel; sa religion toute puissante explique la vie; la science y est celle des Infidèles; seul Allah connaît les choses et que sa volonté soit faite! Or, place Tahrir, les pôles matérialiste et spirituel ont été violemment en contact et ont produit un immense arc électrique! Que veut Allah finalement, quel est son pouvoir, comment agit-il, quelle est sa place; quand la jeunesse exprime toute sa liberté, son indépendance; quand l'univers des Infidèles déferle, s'impose; quand sa technologie, son mode de vie triomphent, quand la Charia ou l'autorité des ulémas volent en éclats!

        C'est une question que ne se pose plus depuis longtemps l'Occident, où la religion chrétienne depuis 1789 ou presque a rejoint l'armoire! La laïcité dit: "Réfléchissez en privé... et surtout pas fort!" Nous vivons largement dans un statu quo! Une bien drôle de situation! Un peu comme si nous étions schizophrènes, la souffrance en moins!

        Nous vivons avec la science, qui est la base de nos sociétés modernes et confortables, comme avec notre travail! Nous fréquentons le monde matériel, puis nous rentrons à la maison, où nous gardons nos convictions! Si nous sommes croyants, nous donnons à Dieu une existence étrange, un pouvoir mal défini, une logique que nous refusons d'éclaircir vraiment, et cela donne une foi entre "deux chaises", fragile et dont l'incohérence est masquée grâce au tapis volant du pouvoir et de l'argent!

        Nous refusons à la science le droit d'entrer dans notre conscience, comme le berger ferme sa porte au loup! Nous craignons sa vérité et les dégâts qu'elle pourrait causer..., et pourtant nous l'utilisons chaque jour, en reconnaissant sa valeur! Nous sommes aussi inconséquents que les terroristes, qui ne peuvent se passer des armes de l'Occident, pour justement détruire celui-ci!

        Une foi borgne, bancale, ne peut qu'avoir peur quand elle est confrontée à ses contradictions. Elle a alors recours au radicalisme et c'est ce qui se passe dans l'exemple égyptien... Après le départ de Moubarak et avec l'aide du nouveau président Morsi, les Frères musulmans veulent installer un état islamique, gouverné par la Charia! Ainsi, l'ambiguïté posée par le monde moderne n'existerait plus; c'est le rejet qui tranche, soulage! C'est aussi la violence qui vient frapper la place Tahrir et qui donnera à l'armée le rôle de sauveur; malheureusement en préambule de sa dictature! Un jour, l'Egypte sera une vraie république et elle pourra mesurer pleinement toute la beauté et l'héroïsme de sa jeunesse!

        Mais une foi solide doit ouvrir les yeux et être vive dans le monde matériel! C'est d'ailleurs la seule manière de lutter efficacement contre tous les intégrismes, qui servent de refuge... Imaginez Israël comprenant qu'il n'y a pas de "peuple élu", mais que chaque religion est le fruit d'une civilisation et une étape dans l'Evolution! La même réflexion conduirait l'islam à ne plus utiliser le terme d'Infidèles, pour désigner les non-musulmans!

        Le seul à notre sens qui ait osé "mettre les pieds" dans le plat est Teilhard de Chardin, moqué par les scientifiques pour son anthropocentrisme et méprisé par le clergé pour son soutien à l'Evolution! Sa position ne pouvait pas mieux être plus clairement définie! Mais ici nous continuons son œuvre, avec notre vision bien entendu! Nous expliquons une logique, où le présence de Dieu est possible, au quotidien, dans toutes les situations!

        Dès lors, la question: "Qui est Dieu?" s'affranchit de tout parti pris, de toute idéologie partisane, et donc de toute violence, de toute haine! Et le vertige commence, la vision ne cesse de s'étendre; le rêve devient infini, le bonheur aussi: l'homme retrouve l'enfant!

        Le vide n'existe plus et le "tapis volant" de la domination, qui inclue le pouvoir et l'argent, n'est plus nécessaire! Mais le moins courageux, le plus facile, bien sûr, c'est de se retrancher dans son trou, derrière ses canons! Même le "bon Dieu" ne passera pas!

  • De la société animale

    De la societe

     

     

     

        Question: quelles différences entre nos sociétés et le mode de vie animal? Réponse: pratiquement aucune! Les animaux obéissent à leurs instincts et chaque jour, ils répètent les mêmes comportements... Le merle a son réveil réglé sur l'aube et il sort alors de sa cachette. Il ne faudrait tout de même pas croire qu'il soit fringant tout de suite! Il lui arrive de rester tout ébouriffé sur un mur... Il somnole encore et il vaut mieux ne pas le déranger à cet instant; sinon il peut montrer toute son irascibilité!

        Ne vous en moquez pas... Regardez dans l'œil noir et cerclé d'or du merle... Vous y verrez bientôt l'ancien dinosaure, celui qui vous épouvanterait, s'il mesurait encore deux mètres de haut! Mais baste, voilà le merle lancé dans ses activités du jour! Contrôle du territoire, réaffirmation de soi, chant comme des coups de ciseaux à qui mieux mieux! Puis, il faut manger aussi... Chasse terrible sur la pelouse! Pas de quartier pour la vermine! De temps en temps, un insecte volant est pris pour cible... Des fruits également... Le sorbier des oiseleurs est le rendez-vous des gourmets!

        Si c'est l'époque, on s'accouple! Le mâle fait son numéro, bec jaune en avant! La femelle cède devant ce "grand fou"! Puis vient le soir, mais attention, c'est de nouveau l'avertissement du propriétaire: "Ici, c'est à moi!" crie-t-il et enfin il va se coucher, et le lendemain ça recommence! Entre-temps, notre merle a bien effectué sa toilette, madame surtout, très longuement, protégée par un feuillage et dans la douce lumière d'un rayon de soleil, s'il vous plaît! Nous avons même vu un troglodyte mignon gazouiller de plaisir, sous une petite pluie; c'était là sa douche!

        A six heures, ou même plus tôt, monsieur X se lève et il n'a pas l'air très vaillant non plus! Il prend son petit déjeuner, se lave et part travailler. Il klaxonne, pour rappeler que c'est lui qui a la priorité! Il a son bureau, il donne des ordres, ou il en reçoit; bref, il a son poste! Puis, il va déjeuner, moment de grâce, mais il paye au lieu de chasser! Les tâches s'accumulent jusqu'au soir et c'est la route du retour, où on klaxonne encore, pour dire qu'on a la..., etc.! Et le lendemain, ça recommence! Dans la nuit, monsieur X fait peut-être des choses étranges, avec madame Y, mais ça ne nous regarde pas!

        Evidemment, il y a le dimanche, les jours fériés et les vacances, mais dans l'ensemble la société se répète chaque jour! Elle a un fonctionnement serré, qui ne varie guère, qui est protégé par des lois, des codes, des sanctions; qui peut sembler tout à fait naturel tellement il est rigide; et nous pourrions en conclure que l'homme est lui-même "prisonnier" de ses instincts, qu'il est incapable d'imagination et que sa société n'est rien d'autre qu'une société animale! Et au fond, pourquoi pas?

        Le problème, c'est que l'homme a "hérité" de la connaissance! La nature l'a pourvu de ce qu'on appelle la conscience! Curieuse chose qui évolue, qui analyse, qui anticipe et dont on ne finit jamais de mesurer les merveilles! Mais, ainsi, l'homme a pu regarder au-delà de ses instincts et ce qu'il découvre l'intrigue et même l'inquiète beaucoup... Il constate d'abord qu'il va mourir et que ce n'est pas forcément une bonne nouvelle!

        Il devient aussi sensible à la souffrance d'autrui, ce qui fait naître chez lui des sentiments comme la pitié; alors qu'un animal blessé est bientôt abandonné par ses compagnons... La vie de l'homme devient plus riche et plus compliquée...

        Mais il n'est pas au bout de ses surprises... On lui apprend qu'il habite une planète, perdue dans une galaxie, dans un univers peut-être infini, avec des milliards d'autres galaxies comme la sienne!

        Sa généalogie aussi donne le vertige! Il descend du singe, bon... Mais si on remonte encore dans le temps, il est dans le rat qui court, pour échapper à la fin des dinosaures! Bref, sa famille la plus éloignée est un cauchemar! Il n'y a nulle assurance à regarder en arrière, ni autour!

        L'homme se retrouve donc avec un étrange instrument, qui s'appelle la conscience, et essaie-t-il de la manier dans toutes les directions, pour en connaître tout le mode d'emploi? Non, l'homme joue à faire l'animal! Il le copie, pourquoi? Mais par peur évidemment!

        Il se réfugie dans un quotidien strict, invariable, au point qu'il s'y sent souvent un esclave! Il fuit son angoisse et de la pire manière qui soit! Certes, il faut manger, mais s'il n'y avait que cela, des milliers de cerfs-volants sillonneraient le ciel, résultat de notre temps libre! Or, c'est plutôt des sirènes d'ambulance qui résonnent sous les nuages!

        C'est bien la peur qui édifie notre système, car elle conduit à la domination!  Pour les gouvernements, c'est une politique, des mesures, une économie, des mots d'ordre, des guerres aussi! C'est de la répression encore, comme en voit actuellement... Pour la population, c'est bien entendu la richesse, l'importance sociale, le m'as-tu-vu, mais encore la haine, le mépris, le racisme, la violence, etc.! Notamment, c'est l'agitation et le bruit, qui méritent une mention particulière, puisqu'il est aujourd'hui impossible d'avoir une pensée cohérente, tant le trafic décervèle! Cela veut dire que nous sommes cloîtrés dans notre angoisse, sans espoir de remèdes!

        Au fond, nous avons peur de notre liberté, mais nous nous aveuglons! La télévision en particulier semble une fenêtre ouverte, un espace créateur, où nous nous amusons et prenons plaisir à la vie! Elle nous montre acteurs, maîtres de notre destin, clairvoyants et responsables, mais elle est en réalité une foire aux égos; elle est le triomphe de la domination, même quand les sujets sont les plus graves, et elle est donc le royaume de l'égoïsme, avec tous ses travers! Son ignorance, ses querelles, sa pauvreté, sa violence nous dégoûtent, mais nous la supportons pour ne plus sentir ni notre ennui, ni notre solitude! Ainsi, vivons-nous comme si nous avions un caramel mou dans la poche!

        Certes, dans l'histoire de l'humanité, des hommes ont eu avec leur esprit (et donc avec l'esprit!) des expériences extraordinaires! Chacun d'eux, il nous semble, a pu parler de libération! Leur message est le résultat d'une expérience mystique, qui est un traitement particulier du réel, à partir d'une observation; ce n'est pas seulement une subjectivité, car ils ont établis des lois dans le sens scientifique du terme et que tous nous pouvons vérifier... Par exemple, une revue de psychologie avait pour une dernièrement cet impératif: "Collaborez!" Or, ce n'est qu'une variante de:"Aimez-vous les uns les autres!" Toujours est-il que des religions sont nées, à la suite de ces témoignages exceptionnels et elles peuvent donner un sens à nos vies, mais elles-mêmes n'échappent pas à la domination, à cause de leur peur, et l'islam radical en est un parfait exemple aujourd'hui!

        Pour comprendre celui-ci, il nous faut revenir à la France d'avant 1789! Dans l'Ancien Régime, le pouvoir était de droit divin... La politique n'existait pas, ni la liberté individuelle, car tout était régi par la volonté de Dieu! Ce que nous étions était déterminé par la religion et en l'occurrence par l'histoire biblique... Nous étions donc tous des pécheurs et nous devions nous amender... Toute tentative d'indépendance était celle du diable! C'est ce qu'on appelle, dans les milieux universitaires, l'hétéronomie, par opposition à l'autonomie... (Comme nous, vous vous coucherez moins bêtes ce soir!)

        Mais il n'est pas possible d'arrêter notre développement! C'est la religion elle-même, par son système de "castes", qui se met dans la position d'être détruite! Les roturiers ne peuvent pas avancer face aux nobles et ils se révoltent: le chemin vers la laïcité est ouvert! De même la religion hindoue a dû évoluer, parce qu'elle avait créé les Intouchables!

        A une certaine époque, ceux-ci étaient contraints de porter une écuelle autour du cou, pour que leurs crachats ne souillent pas le sol, et ils traînaient une balayette qui effaçait leurs traces! Cette condition infâmante, qui se voulait imposer par Dieu, a elle aussi conduit à une rébellion, menée par le leader des Intouchables: Babasaheb Ambedkar (1891, 1956)!

        Les religions sont le message d'une époque et leur hiérarchie notamment a pu être instituée pour la défense du territoire ou du groupe..., mais même Jésus ou Mahomet ont voulu devenir eux-mêmes! C'est ce que le Printemps arabe a voulu rappeler en substance: nous avons besoin de notre liberté pour être, pour nous épanouir, car que vaut une existence commandée? A quoi sert une conscience qui est étouffée? Sissi a repris en main l'Egypte, mais le pouvoir y est désormais définitivement "désacralisé"!

        Cependant, l'Occident a de quoi effrayer l'Orient! Un abîme s'est creusé entre eux et la tentation est grande pour l'Orient d'imaginer un état idéal, représenté par la communauté du Prophète, elle-même gouvernée par la Charia, et vers lequel on pourrait retourner, pour échapper à la peur, au vertige, que suscitent la science, le développement de l'Occident!

        Un des hommes du terroriste Zarqaoui était sans jambes... Il avait été chargé de placer une bombe dans un cinéma jordanien..., mais il fut tellement fasciné par le film occidental, qu'il avait sous les yeux, qu'il en oublia sa bombe et qu'elle explosa sous lui! Pour beaucoup d'intégristes islamistes, la découverte du monde des "Infidèles" est un véritable choc (sans vouloir faire un triste jeu de mots!)!

        Pourtant, la liberté, ou la maturité, affichée par l'Occident est un leurre, une illusion; Trump est là pour nous le prouver! Le président américain est en train de replacer le monde dans un état de guerre! Il écrase l'Iran, aboie contre tous ceux qui l'approchent; il isole les chiites, ce qui réjouit la majorité musulmane sunnite! Pour "fêter ça", l'Arabie saoudite vient de décapiter trente chiites soupçonnés de terrorisme; c'est un bel hommage rendu à Trump!

        Le prix du pétrole s'affole, car la production iranienne n'est plus possible; on craint une pénurie et la situation sociale européenne ne va pas cesser de se dégrader! Tous ceux qui ont été victimes de Trump rejoignent la Russie: la Corée du Nord, la Syrie, la Turquie, l'Iran... A un moment donné, les deux géants, Etats-Unis et Russie, devront se faire face, pour défendre leurs intérêts ou leurs partenaires!

        Trump a repris le rôle désormais classique de la bête enragée dans la jungle, celui tenu avant lui par les plus grands despotes, qui nous ont plongé dans la catastrophe! Trump pourrait être l'homme du dialogue, un constructeur, mais il est incapable de vivre en paix. Il est d'abord sans culture, l'histoire de son propre pays ne l'intéresse même pas! Pour soulager son angoisse, pour vaincre sa peur, il n'a qu'un moyen l'action ou plutôt le conflit! Lui aussi n'a recours qu'à sa domination! C'est le comportement animal face à l'interrogation humaine! C'est l'enfant qui perdure!

        Sur la scène internationale, c'est de l'agressivité, du défi, de l'instabilité, du rapport de force, de la morgue, jusqu'à... la rupture, la crise! Un attentat terroriste (et on aura tout fait pour qu'il arrive!) pourrait servir de prétexte à une déclaration de guerre! On serait alors dans la même situation qu'en 14! L'assassinat de Sarajevo alerte les chancelleries... Commence alors un processus provoqué par la peur... Sans songer sérieusement à la guerre, on se prépare quand même, pour ne pas être surpris; ce que l'adversaire prend pour une menace et ce qui le conduit lui aussi à un dispositif plus dur! Un engrenage se met en route que plus personne ne peut arrêter! Aujourd'hui encore, il est impossible de savoir exactement qui a déclenché la guerre et pourquoi! Mais le résultat est toujours le même: des milliers ou des millions de morts, avant qu'on s'arrête, épuisé et effaré par tant de folie!

        Ici, un mot sur l'invention du diable! Comment croire en Dieu, face au malheur? L'explication la plus commune est qu'Il nous met à l'épreuve... La Genèse va même plus loin, quand elle dit que nous sommes tous pécheurs! Evidemment, ces points de vue apportent du grain au moulin de l'athéisme, qui lui voit une solution bien plus simple: Dieu n'existe pas et c'est tout!

        Il y a pourtant une troisième voie, qui est celle des lois de la sagesse, dont témoignent déjà les religions, mais que nous nous efforçons nous-même de mettre au "goût du jour"... et donc voici quelques éléments pour un manuel de survie!

        Plus vous serez mal à l'aise, c'est-à-dire plus vous ressentirez de l'angoisse, et plus il faut vous attendre à de la domination dehors, car le trouble est général! Cela revient à ce que dans la rue vous subissiez, de la part des hommes, un défi de plus en plus fort, et, de la part des femmes, une séduction de plus en plus insistante! L'égoïsme ambiant est de plus en plus pressant!

        Mais plus vous constaterez ce phénomène et plus vous vous rendrez compte que vous avez raison, que vous voyez clair (que vous êtes dans la "Dream Team"!); et plus votre angoisse diminuera, car c'est bien la connaissance (mais toute la connaissance) qui nous aide à ne plus avoir peur de l'inconnu!

        La domination, elle, tyrannise et n'a qu'une seule issue, c'est l'affrontement! Au fond, Trump ne sera heureux qu'avec un casque sur la tête! Bonne chance à tous!

  • Des fléaux

    Des fleaux

     

     

     

     

        Si on regarde notre temps, il est tentant de dire qu'il n'y a qu'un seul fléau, c'est la religion! On n'arrête pas en effet de tuer au nom du dieu qu'on vénère! Cela nous accable au plus profond, car se représenter Dieu tel un bourreau ou un assassin est évidemment une absurdité!

        Mais, pour aider la mort, il y a de la concurrence: le nazisme ou le communisme n'ont rien à envier aux religions; sans doute même ont-ils été plus efficaces, car ce sont des états entiers qui ont donné leur plein rendement! La religion reste passionnelle; elle n'a pas la froideur de la politique et ses tueries gardent ainsi un caractère artisanal, dû à leur spontanéité!

        Mais c'est tout juste! Car notamment le vaste projet de l'islam radical, retrouver la grandeur de l'ancien Empire ottoman, n'est pas très différent de ceux d'un Hitler ou d'un Pol Pot! Ils ont un point commun et c'est lui le véritable fléau! Le problème n'est pas la religion ou l'idéologie, mais c'est bien le désir d'imposer coûte que coûte une pensée, un point de vue, un mode de vie, une manière d'être! Autrement dit, c'est la domination qui est à l'origine des massacres ou des génocides; c'est elle qui pousse à mettre le monde à feu à sang! C'est elle qui le veut à son image et nous allons de nouveau expliquer pourquoi!

        Au fond, la logique est simple... C'est la peur qui provoque essentiellement la domination (même si cette dernière nous est naturelle...)! Le fait d'exercer un contrôle sur les autres permet d'apaiser ses craintes et son angoisse! Le sentiment de son importance, de son pouvoir, de sa supériorité efface l'anxiété, donne un sens à la vie! Rappelons que la domination masculine est la force et la féminine la séduction!

        Disons encore un mot sur la peur... Les animaux l'éprouvent aussi bien entendu, mais chez eux elle est limitée par le comportement instinctif! L'homme, lui, est devant une étrangeté... Il doit faire face à quelque chose qui n'est pas figé... et qui pourrait être symbolisé par la mort! Prendre conscience de sa fin, alors qu'on ne souhaite que se développer, comme apparemment tout ce qui vit, fragilise l'existence, y répand un sentiment d'insécurité, qui peut être ressenti dès le plus jeune âge, si on ne bénéficie plus de la protection des parents, parce que eux-mêmes ne sont plus, ou même parce que l'enfant se sent injustement traité!

        Toujours est-il que l'homme fait le dur apprentissage de la liberté... Les questions que pose sa condition peuvent sembler insolubles, d'autant que la science étend toujours plus notre histoire et notre univers! L'abîme peut s'ouvrir à tout moment et il est capable de nous écraser! L'angoisse est un compagnon de route, que nous tenons plus ou moins bien à distance et cela dans le cas où nous sommes assez clairvoyants, car la plupart du temps la majorité n'a pas de discernement et elle est prompte à trouver les responsables de son mal-être, comme si nous n'étions pas en réalité tous à la même enseigne, devant l'inconnu!

        Mais la peur engendre la domination et très vite ses extrêmes: le mépris, la haine et la violence! Derrière chaque tyran se cache la peur et on peut même avancer que plus elle confine à la terreur et plus la dictature est forte! Les bourreaux, dont notre histoire a retenu les tristes noms, étaient tous des angoissés! Et, entre eux et nous, c'est juste une question de degré! Mais leur domination a sans doute été paroxysmique pour mieux échapper à la peur, car plus on se sent important et plus il est difficile de la reconnaître... Mais donnons quelques exemples...

        Commençons par le champion toute catégorie, Hitler! Très jeune, il est livré à lui-même... Son père est mort et il ne va plus à l'école. Il passe son temps à errer dans la campagne, en proie à ses rêveries! Plus tard, majeur, il arrive à Vienne où il n'a pas un sou en poche. Il survit en peignant des cartes postales et il n'est pas difficile d'imaginer quelles inquiétudes peuvent le ronger!

        Mais, à sa peur, il va donner un nom! Elle est pour lui représentée par les Juifs, qu'il voit comme des profiteurs, des sournois, qui dirigent dans l'ombre l'économie du pays et qui la minent! Ils sont les responsables de toutes les misères, y compris celle d'Hitler! Les dominer, les chasser, les détruire enlèverait la peur, en ramenant la sécurité! C'est ce que fera exactement Hitler, quand il sera au pouvoir! Six millions de Juifs seront tués pour calmer son angoisse!

        Mais la peur rend aussi instable... Elle peut faire agir malgré soi, si elle envahit le cerveau, alors que celui-ci n'a pas de fondations solides, comme il arrive souvent après une enfance solitaire! Hitler, au fond, n'a jamais voulu du putsch de Munich et il se verra d'ailleurs, toute sa vie, comme un peintre, un artiste, dont la vocation aura été contrariée par la nécessité politique!

        Car, à cette époque, Hitler voit les démocrates qui dirigent son pays comme des traîtres! Ce sont eux qui sont responsables de la défaite de 18! Ce n'est pas l'armée qui a été vaincue! Hitler n'a-t-il pas éclaté en sanglots en apprenant la reddition et un jour, n'en pouvant plus de la politique d'après-guerre, il va menacer d'une arme à feu des élus réunis dans une brasserie, pour obtenir une scission du territoire!

        S'il avait pu être lucide, Hitler aurait reconnu la folie de son geste... Dans une société civilisée, on n'obtient rien par la force, mais Hitler se serait cru un lâche en n'agissant pas! Ainsi, son tourment apparaît évident et d'ailleurs, bien que condamné à la prison, Hitler ne s'y sentira pas malheureux... Bien au contraire, les murs lui enlèveront la question douloureuse chez lui du choix! C'est là qu'il livrera volontiers ses idées à d'autres oreilles malades, celles de Rudolf  Hess; c'est là que s'écrira Mein Kampf!  

        Car, la peur seule, bien entendu, ne saurait expliquer le "monstre"! Sa vision du monde est sans nuances... Elle n'est pas le fruit d'un esprit intelligent... Elle cède toujours à la facilité, à l'égoïsme! C'est la rançon de la médiocrité! Les arguments d'Hitler sont plus des envies, des partis pris, plutôt que des développements! Toute l'immaturité de leur auteur s'y révèle! On dirait un bébé hargneux et avide, qui ne prend pas du tout en compte la réalité, et on peut se demander comment a-t-il pu devenir chancelier? Mais le peuple allemand se moquait de lui comme les Américains de Trump, avant de l'élire président! A force de jouer avec le feu, on finit par allumer l'incendie!

        Hitler commémorera son putsch, en retournant, avec ses hommes, sur les lieux et à la date anniversaire de l'événement. Mais, comme sur quasiment toutes les photos qui le montrent, il y apparaît tendu, les poings crispés, car lui seul, au tréfonds, sait qu'on y célèbre surtout son angoisse et nullement son courage! C'est ce mutisme, quant au trouble qui produit sa conduite, qui va le mener sur la route de ses crimes impardonnables!  C'est son amour-propre qui fera de lui un assassin! Il n'y a aucune honnêteté morale chez Hitler et dès lors qu'il sera au pouvoir, son déséquilibre ne cessera de s'amplifier!

        En effet, il est un peu comme ces stars de la musique, qui aiment monter sur scène, mais qui, après coup, sont ravagés par la peur! Ce n'est pas naturel de s'exhiber et cela use, épuise! La carrière de comique, en particulier, fait vieillir prématurément! Ainsi, en 40, Hitler est-il le premier à vouloir ralentir ses chars, alors qu'ils foncent en terrain dégagé, à travers la France! La situation dépasse ses nerfs, mais sa crainte d'une brusque réplique française laisse indifférents ses généraux, plus aguerris et plus rassis!

        Pour une fois, Hitler n'obtient pas gain de cause et ses chars se rapprochent de Dunkerque, où ils vont pouvoir exterminer l'ennemi! Mais pour Hitler, c'est trop! Il a besoin de calme, pour se reprendre; il n'est plus capable de supporter d'aller de l'avant et il stupéfie ses généraux en arrêtant son armée et en racontant combien l'Angleterre est une grande nation et comme il est nécessaire qu'elle subsiste! Hitler se croit obligé de donner des explications, pour masquer sa peur! Tant mieux pour les alliés!

        Bientôt, il ne dort plus ou il ne trouve le sommeil qu'à l'aube, pour ne se réveiller qu'à midi et on imagine dans quel état (nous ne le plaignons pas évidemment, nous déchiffrons un comportement...)! Il a besoin de pilules pour tenir debout et la moindre contrariété le met dans des colères terribles; mais ce n'est pas seulement parce que ses nerfs sont malades et déjà fortement éprouvés, c'est aussi parce que l'opposition ouvre la porte au doute, fait resurgir la peur! Or, la différence n'est rien d'autre qu'une réalité plus étendue et comme il ne veut pas l'entendre, Hitler ne peut pas gagner la guerre!

        Pour les mêmes raisons, l'échec lui devient intolérable et c'est pourquoi il traite avec le plus grand mépris son armée vaincue à Stalingrad, de sorte que celui qui la commande, le général Paulus, finit par collaborer avec les Russes. Au final, Hitler se suicide sur les ruines de son pays et de l'Europe, dans une totale hébétude! Il n'aura rien compris, ni à la vie, ni à lui-même!

        Mais voici Staline, qui apparaît comme un paysan madré, mais la vérité est tout autre! Lui aussi est d'une origine modeste et provinciale, et son enfance sera marquée par les violences d'un père alcoolique!  Le "pied" affectif de Staline n'est donc pas solide et il a très peu confiance en lui-même... Cela explique sans doute pourquoi il signe avec Hitler un pacte de non agression, au détriment des habituels alliés de la Russie, la France et l'Angleterre. Car, ce n'est pas seulement parce qu'il se souvient des défaites de l'armée russe, face à l'Allemagne, lors du premier conflit mondial, mais c'est surtout qu'en rejoignant le plus "fort" il joue les affranchis, les rusés! C'est son personnage pour pallier son incertitude!

        Mais, derrière le masque, sa candeur apparaît! Alors même qu'Hitler commence à envahir la Russie, des convois russes, chargés de matières premières, continuent à partir vers l'Allemagne, signe de la bonne volonté de Staline! Sa peur d'être trompé va s'en aggraver, tandis qu'elle l'a déjà poussé à devenir un tyran absolu! Staline élimine ses adversaires, autant par crainte que par jalousie! C'est son manque d'assurance qui le rend si dangereux!

        Il prêche encore le faux, pour découvrir le vrai; car son doute est tel qu'il ne peut juger autrement! Lors de l'anniversaire de Churchill, à Téhéran (novembre 43), alors que tous les convives se réjouissent de l'ambiance, Staline se lève brusquement pour déclarer qu'il est dommage qu'il ne soit pas aimé de son homologue anglais, et ce n'est que devant les grands efforts de celui-ci, pour lui prouver le contraire, que Staline s'apaise et devient sûr de l'amitié qu'on lui voue!

        De même toujours méfiant, il divise pour mieux régner... Attention, voici dans l'ordre ou le désordre,  le Turkménistan, l'Ouzbékistan, Le Kazakhstan, le Kirghizstan et le Tadjikistan; autant d'états formés par Staline en Asie centrale et qui ont bien du mal à survivre encore aujourd'hui! Ambitieux et fragile, le "petit père des peuples" reste l'image même du sournois!

        Cependant, le cas de Pol Pot est bien plus étrange! C'est d'abord un lycéen effacé, grassouillet et à fortes lunettes, dont le vrai nom est Saloth Sar, avant qu'il ne poursuive ses études à Paris, où il découvre le communisme, comme Hô Chi Minh... Puis, au moment de la guerre du Viêt-Nam, il retrouve son pays, le Cambodge, mais c'est pour s'y enfoncer dans la jungle la plus reculée! Là, il est en totale sécurité et bien qu'il soit coupé du monde, il commence à professer, ce qu'il sait si bien faire, en évitant tout opposant, tout conflit! Il persuade les paysans pauvres et incultes qu'ils sont exploités, que tout doit changer, que les riches doivent "payer"! Il leur promet un avenir radieux et captive surtout les jeunes, dont le nombre grandit sans cesse; ce seront les tristement fameux Khmers rouges!

        Mais, quand les conditions sont enfin favorables, il ne prend pas d'assaut la capitale, non, il la fait vider de tous ses habitants, ce qui est sans doute unique dans l'histoire de l'humanité! Ce n'est que quand Phnom Penh est désert et abandonné  aux rats que Pol Pot s'y installe, dans la même sécurité que celle de la jungle! Pol Pot ne conquiert pas le monde, mais il le ramène à lui! Sa crainte, sa prudence le veulent ainsi et quand des dignitaires étrangers désirent le voir, Pol Pot attend lui aussi dans le groupe, en ne se révélant pas, ce qui lui permet d'examiner en toute quiétude ses visiteurs! Il est somme toute incapable d'apparaître en plein jour et lorsque les Vietnamiens renversent eux-mêmes son régime, il ne résiste pas, ne les affronte pas, mais il rejoint à nouveau la forêt, pour y répandre encore sa parole, jusqu'à sa fin; comme si un brouillard délétère s'était brusquement répandu sur le pays, avant de disparaître et de laisser derrière lui peut-être trois millions de morts, c'est-à-dire la moitié de la population!

        Notez que la peur chez les tyrans leur fait rêver d'un état idéal, sans aspérités, où il pourrait enfin se reposer! Hitler imaginait une grande Allemagne, pure, vivant en totale autarcie, comme éternelle! Les films de la propagande stalinienne montrent des anges souriants au travail! Pol Pot parlait d'un grain de riz originel, débarrassé de toute souillure occidentale! Les extrémistes juifs voient dans la reconquête du territoire d'Israël le rachat de leur paradis perdu; alors que la science moderne a balayé depuis longtemps l'histoire biblique! Quant aux radicaux islamistes, ils ont une vision idyllique de la communauté héritée du Prophète et que gouvernait la charia; comme si l'homme ou la femme n'étaient pas en lutte pour le pouvoir et qu'une société pouvait se conduire tel un village!

        Mais à quoi peut nous servir, dans nos vies quotidiennes, de savoir que la peur provoque la domination? Mais, à chaque fois qu'un homme veut nous dominer, par sa carrure, son mépris ou sa haine, nous pouvons nous dire qu'il a d'abord peur et cela devrait être une "victoire" assez satisfaisante pour ne pas renchérir (d'autant qu'il serait assez facile de faire réapparaître cette peur...)! De même, il nous est possible de mieux garder la tête froide, quand une femme fait preuve d'une sexualité quasi irrépressible, car celle-ci est le fruit de l'angoisse, de l'immaturité, donc de l'égoïsme et non du choix!

        En fait, c'est la connaissance qui permet de rester en paix et ainsi d'apaiser le monde!